«Solennels parmi les couples sans amour, ils dansaient, d'eux seuls préoccupés, goûtaient l'un à l'autre, soigneux, profonds, perdus. Béate d'être tenue et guidée, elle ignorait le monde, écoutait le bonheur dans ses veines, parfois s'admirant dans les hautes glaces des murs, élégante, émouvante, exceptionnelle, femme aimée, parfois reculant la tête pour mieux le voir qui lui murmurait des merveilles point toujours comprises, car elle le regardait trop, mais toujours de toute son âme approuvées, qui lui murmurait qu'ils étaient amoureux, et elle avait alors un impalpable rire tremblé, voilà, oui, c'était cela, amoureux, et il lui murmurait qu'il se mourait de baiser et bénir les longs cils recourbés, mais non pas ici, plus tard, lorsqu'ils seraient seuls, et alors elle murmurait qu'ils avaient toute la vie, et soudain elle avait peur de lui avoir déplu, trop sûre d'elle, mais non, ô bonheur, il lui souriait et contre lui la gardait et murmurait que tous les soirs ils se verraient.»Ariane devant son seigneur, son maître, son aimé Solal, tous deux entourés d'une foule de comparses:ce roman n'est rien de moins que le chef-d'oeuvre de la littérature amoureuse de notre époque.
Peu de livres ont connu un succès aussi constant que Le livre de ma mère. Ce livre bouleversant est l'évocation d'une femme à la fois «quotidienne» et sublime, une mère, aujourd'hui morte, qui n'a vécu que pour son fils et par son fils.
Ce livre d'un fils est aussi le livre de tous les fils. Chacun de nous y reconnaîtra sa propre mère, sainte sentinelle, courage et bonté, chaleur et regard d'amour. Et tout fils pleurant sa mère disparue y retrouvera les reproches qu'il s'adresse à lui-même lorsqu'il pense à telle circonstance où il s'est montré ingrat, indifférent ou incompréhensif. Regrets ou remords toujours tardifs.
«Aucun fils ne sait vraiment que sa mère mourra et tous les fils se fâchent et s'impatientent contre leurs mères, les fous si tôt punis.»
Albert Cohen n'a jamais été député ni ministre et n'a pas abrité des dizaines de coreligionnaires dans des souterrains. Il n'a pas davantage enlevé une future épouse à la barbe d'un prétendant. Solal est pourtant nourri de sa vie. La peinture de Céphalonie doit beaucoup à son séjour à Corfou en 1908, Genève est un pôle majeur de son existence, les silhouettes des diplomates et des politiciens, la famille Sarles, viennent directement de son expérience. Les préoccupations, voire les déchirements, de Solal trouvent leur source dans le moi profond de l'auteur, amoureux de la France et de sa culture sans vouloir rien renier de ses origines.
Surnommé aussi longues dents et oeil de Satan et lord High Life et sultan des tousseurs et crâne en selle et pieds noirs et haut de forme et bey des menteurs et parole d'honneur et presque avocat et compliqueur de procès et médecin de lavements et âme de l'intérêt et plein d'astuce et dévoreur des patrimoines et barbe en fourche et père de la crasse et capitaine des vents.
Coffret de deux volumes vendus ensemble, comprenant Belle du Seigneur et Oeuvres.
«Un enfant juif rencontre la haine le jour de ses dix ans. J'ai été cet enfant.»Albert Cohen.
Les Valeureux, ce sont les cinq cousins Solal de Céphalonie : le charmant et naïf oncle Saltiel, le délicieux petit Salomon, Michaël le séducteur, Mattathias l'avare et surtout Mangeclous, le bey des menteurs, le «capitaine des vents», perpétuellement affamé, aussi fertile qu'Ulysse en tours ingénieux, telle l'Université Supérieure et Philosophique de Céphalonie, où il donne de savoureux cours de séduction, ou cette épître à la Reine d'Angleterre, riche en conseils culinaires.
Peu de lecteurs de Belle du Seigneur, en 1968, savaient que ce roman était le dénouement d'un cycle inauguré en 1930 avec un premier chef-d'oeuvre, Solal, prolongé par Mangeclous en 1938 et achevé en 1969 avec la publication, à contretemps, des Valeureux... Quarante ans d'aléas éditoriaux avaient fait perdre de vue la continuité chronologique du récit et, plus encore, son unité d'inspiration. Rassemblant pour la première fois en un volume cette tétralogie avec le titre que son auteur aurait voulu lui donner, Solal et les Solal, cette édition Quarto invite à relire d'un oeil neuf une oeuvre d'exception, à mieux en mesurer le rythme, à savourer l'équilibre entre les volets dramatiques (le scénario obsédant de l'ascension et de la chute du héros) et comiques (l'univers burlesque de Mangeclous et des siens), la fantaisie baroque et la veine satirique, le souffle épique et la tentation lyrique. À travers la vie aventureuse de «Solal des Solal», enfant prodigue du ghetto à la poursuite d'un rêve d'Europe, se déploie une ample méditation sur le destin juif, la culture occidentale, l'amour et la condition humaine, servie par une prose généreuse et inventive qui ne se refuse aucune audace. L'édition de Philippe Zard offre un important appareil critique qui reconstitue le contexte culturel de l'oeuvre, et élucide, dans de riches notes, les références littéraires, bibliques, artistiques et religieuses, les allusions à des événements ou des personnages historiques, les mots rares et les régionalismes. Les présentations des romans mettent en lumière la teneur politique et philosophique de l'oeuvre, ainsi que les tensions et les contradictions qui la nourrissent:«Cohen est un écrivain juif comme Césaire est nègre et Claudel catholique:ces adjectifs portent, idiomatiquement, le tout de la question humaine» («Solal et les Solal:le roman introuvable»).
Ce second - et dernier - volume des OEuvres d'Albert Cohen dans la Pléiade permet au lecteur de retrouver l'univers de Solal et de Belle du Seigneur.
Premier élément de l'édifice, Solal paraît en 1930. En 1938, Mangeclous est présenté par l'auteur comme le deuxième volume d'une série qui s'intitulerait Solal et les Solal et dont le troisième volume, alors en préparation, est annoncé sous le titre de Belle du Seigneur. En 1968 paraît enfin Belle du Seigneur, suivi dix-sept mois plus tard des Valeureux. Ces deux derniers volumes ne devaient en former qu'un. C'est à la demande de son éditeur qu'Albert Cohen scinde l'ouvrage en deux livres indépendants.
Centrale dans l'oeuvre d'Albert Cohen et chère à l'écrivain - qui aimait à raconter comment l'histoire de Solal avait d'abord été dictée à une «merveilleuse amie» pour lui plaire - la geste de Solal atteint à la grandeur par son mépris des limites. Principal acteur d'une histoire qui n'a ni commencement ni fin, Solal a la beauté insolente des héros d'Homère, lui qui peut mourir et se lever et qui, reprenant le départ, a le pouvoir de regarder le soleil «face à face».
« Un héros comme Mangeclous atteint à l'épique. Il y a là, à mon sens, quelque chose sans aucune espèce de comparaison. Il y a du souffle de Rabelais. C'est comme dans Rabelais : on accepte tout. On accepte tout parce qu'il y a un amour du personnage, parce qu'il y a une manière démesurée de le traiter qui fait que simplement on est ébloui. » Joseph Kessel.
« L'admirable Mangecloux, un grand héros comique d'une drôlerie extraordinaire. Le comique de Mangeclous est juif par sa subtilité, par les récifs de mélancolie qui affleurent soudain, par l'observation féroce et tendre qui le nourrit. Mais ce roman acquiert une portée générale par son humanité, son grand rire salubre, sa verve populaire. Sa fraîcheur, sa fruste saveur, sa robuste simplicité le font accéder à la majesté des légendes populaires et des grandes épopées. » Marcel Pagnol.
Coffret 3 volumes vendus ensemble
Ce journal va du 3 janvier au 2 septembre 1978. Albert Cohen a quatre-vingt-trois ans. Sa fin, dont il sent l'imminence, l'oblige soudain à ramasser par fragments incantatoires ses méditations obsessionnelles : l'enfant Albert Cohen fou d'amour pour sa mère, le lycéen de Marseille fou d'amitié pour son condisciple Marcel Pagnol, le jeune homme fou des femmes qu'il nomme ses «merveilles», enfin le vieil homme fou du peuple d'Israël et d'un Dieu auquel il aspire à croire mais qui refuse sa délirante prière.
Dans cet ensemble d'invocations quasi rythmées où la violence, la cruauté, la tendresse le disputent à l'humour, Albert Cohen s'abandonne à la hantise d'une mort dont le thème, depuis ses débuts en littérature, double toujours d'obscurité ses oeuvres les plus radieuses.
De sa place de bonne, Mariette voit et sait tout ce qui concerne sa jeune maîtresse qu'elle connaît et qu'elle aime depuis sa naissance, celle qui va devenir la Belle du Seigneur. Profonde et drôle elle soliloque avec un franc-parler imagé et cocasse et une percutante philosophie populaire qui fait mouche car elle voit et parle juste. Anne Danais a eu un coup de foudre pour Mariette il y a plus de 25 ans. Fascinée par ses monologues, elle les a extraits du livre, les a lus et relus, teintés de l'accent des Deux-Sèvres de ses grands-parents maternels et Mariette s'est installée durablement en elle... jusqu'au printemps 2008 où Anne Quesemand lui a proposé de la mettre en scène suite à une lecture. « Les Soliloques de Mariette » ont vu le jour un an plus tard et ravissent le public depuis lors.
Extraits de Belle du Seigneur d'Albert Cohen (Gallimard 1968).
Ces textes, d'Albert Cohen, ont été publiés dans les années 20 dans la Nouvelle Revue Française et dans la Revue Juive. Ils marquent l'entrée en littérature du jeune Albert Cohen, remarqué et admiré par Jacques Rivière, directeur et animateur de la Nouvelle Revue Française puis, quelques temps après par Max Jacob, André Spire, et Albert Einstein.
Depuis lors, ces textes n'avaient jamais été réédités.
On y retrouve la langue, le style, et l'humour de l'auteur de Belle du Seigneur et de Mangeclous.
Ils témoignent par ailleurs, selon Christel Peyrefitte " que la totalité des thèmes qui seront ultérieurement développés jusqu'à l'obsession est déjà présente ".
Écrits d'Angleterre
On sait que, dès juin 1940, Albert Cohen rejoignit l'Angleterre pour continuer la lutte contre l'Allemagne nazie. Installé à Londres, il deviendra, en 1945, conseiller juridique du Comité intergouvernemental pour les réfugiés.
Le présent volume réunit trois textes de cette période :
- Angleterre, un hymne superbe à la grandeur de ce pays qui a porté de façon admirable l'esprit de résistance durant les années de guerre ;
- Churchill d'Angleterre, portrait inspiré et lyrique du vieux lion et des années de combat ;
- le texte intégral d'une conférence prononcée à Genève en janvier 1949 sur L'Organisation internationale pour les réfugiés et la protection juridique et politique.
Magnifiques textes littéraires, dignes des meilleures pages romanesques d'Albert Cohen, ces Écrits d'Angleterre étaient devenus introuvables depuis de nombreuses années.
Mort de Charlot
suivi de "Projections ou après-minuit à Genève" et "Cher Orient"
Ces textes, d'Albert Cohen, ont été publiés dans les années 20 dans la Nouvelle Revue Française et dans la Revue Juive. Ils marquent l'entrée en littérature du jeune Albert Cohen, remarqué et admiré par Jacques Rivière, directeur et animateur de la Nouvelle Revue Française puis, quelques temps après par Max Jacob, André Spire, et Albert Einstein.
Depuis lors, ces textes n'avaient jamais été réédités.
On y retrouve la langue, le style, et l'humour de l'auteur de Belle du Seigneur et de Mangeclous.
Ils témoignent par ailleurs, selon Christel Peyrefitte - que la totalité des thèmes qui seront ultérieurement développés jusqu'à l'obsession est déjà présente -.
Handsome, worldly and intelligent, Solal holds a position of enviable power in 1930s Geneva. But as Under-Secretary-General of the League of Nations, he has become bitterly disillusioned by international affairs and the self-serving people who surround him. His one hope for redemption is through love - and he embarks on the audacious seduction of Ariane, the beautiful, daydreaming wife of a dull-witted, social-climbing employee of the League. In Her Lover, Albert Cohen created a world humming with the many vivid and eccentric voices of its wonderfully observed characters. Brilliantly inventive and baroquely detailed, this magnificent novel is a merciless satire of middle-class manners and ambitions, and of the Byzantine machinations of global politics.
On sait que, dès juin 1940, Albert Cohen rejoignit l'Angleterre pour continuer la lutte contre l'Allemagne nazie.
Installé à Londres, il deviendra, en 1945, conseiller juridique du Comité intergouvernemental pour les réfugiés.
Le présent volume réunit trois textes de cette période :
- Angleterre, un hymne superbe à la grandeur de ce pays qui a porté de façon admirable l'esprit de résistance durant les années de guerre ;
- Churchill d'Angleterre, portrait inspiré et lyrique du vieux lion et des années de combat ;
- le texte intégral d'une conférence prononcée à Genève en janvier 1949 sur L'Organisation internationale pour les réfugiés et la protection juridique et politique.
Magnifiques textes littéraires, dignes des meilleures pages romanesques d'Albert Cohen, ces Ecrits d'Angleterre étaient devenus introuvables depuis de nombreuses années.
« Solennels parmi les couples sans amour, ils dansaient, d'eux seuls préoccupés, goûtaient l'un à l'autre, soigneux, profonds, perdus. Béate d'être tenue et guidée, elle ignorait le monde, écoutait le bonheur dans ses veines, parfois s'admirant dans les hautes glaces des murs, élégante, émouvante, exceptionnelle, femme aimée, parfois reculant la tête pour mieux le voir qui lui murmurait des merveilles point toujours comprises, car elle le regardait trop, mais toujours de toute son âme approuvées, qui lui murmurait qu'ils étaient amoureux, et elle avait alors un impalpable rire tremblé, voilà, oui, c'était cela, amoureux, et il lui murmurait qu'il se mourait de baiser et bénir les longs cils recourbés, mais non pas ici, plus tard, lorsqu'ils seraient seuls, et alors elle murmurait qu'ils avaient toute la vie, et soudain elle avait peur de lui avoir déplu, trop sûre d'elle, mais non, ô bonheur, il lui souriait et contre lui la gardait et murmurait que tous les soirs ils se verraient. » Ariane devant son seigneur, son maître, son aimé Solal, tous deux entourés d'une foule de comparses : ce roman n'est rien de moins que le chef-d'oeuvre de la littérature amoureuse de notre époque.