L'île est au milieu du lac. Le lac au milieu des montagnes. Sur l'île il y a une maison, comme une île dans l'île. Un homme vit là. Le temps en ces lieux pourrait être celui de l'éternité. La vie parfaite, achevée, pourrait tenir tout entière dans une pierre de rêve. C'est le récit qu'en fait Arnaud Rykner, avant de faire celui de la fin d'un monde. Poème narratif sur le temps, un hommage à la culture japonaise qui sonne avec la beauté des haïkus.
En juillet 1944, l'un des derniers convois de déportés met trois jours pour aller de Compiègne à Dachau. Sur plus de 2 000 hommes entassés dans vingt-deux wagons, plus de 500 mourront dans le voyage. Sur ce fait historique, vécu par un membre de sa famille, Arnaud Rykner fait le pari de la littérature, en inventant le monologue d'un jeune homme de vingt-deux ans qui raconte, au fil des heures, l'enfer vécu.
Deux hommes s'écrivent, l'un vient de sortir de prison, pour une tentative de meurtre passionnel. L'autre tente de le soutenir dans la tâche difficile de reprendre pied dans le monde social, notamment pour qu'il réintègre son poste d'enseignant. Traitant de questions sociales comme la prison et la difficile réinsertion des prisonniers, ce nouveau roman d'Arnaud Rykner s'appuie sur la correspondance qu'il a tenue avec un prisonnier.
Comme dans "Le Wagon", son dernier roman, il s'appuie sur le vécu et le réel pour inventer du roman et, surtout, s'interroger sur la condition humaine.
Mineur de fond, Arnaud Rykner tente l'aventure d'un poète intersectionniste.
Pas savoir, pas penser, dit-il.
Alors quoi.
Vivre ou mourir.
Quoi qu'il arrive, les deux nous adviennent.
Tout est là, disponible.
L'angoisse de l'enfant face à la traversée du sommeil.
Le besoin d'une main. Le pur toucher qui rassure pour rentrer dans la mort.
Claude Régy
Il lui a donné secrètement ce nom, Nur, qui en allemand signifie seulement.
Peut-être seulement elle, seulement son corps de femme enfermé dans une chambre d'une ville orientale aux quartiers ravagés par la guerre. Un nom qui se prononce Nour, c'est-à-dire lumière en arabe. Pendant quelques jours, ils vont vivre ce qu'il appelle un " amour de roman ", l'absolu d'un impossible amour. Une porte se renferme sur eux dans la rencontre des corps. Une porte s'ouvre en l'homme, le rendant à lui-même, sans masque, sans mensonges et sans mots.
Il se plaît à n'y rien comprendre, perdu en pleine lumière dans la foule pauvre et joyeuse. La femme avance en lui, pareille à cette ville qu'il parcourt comme pour mieux suivre, plus tard, de retour dans la chambre, le tracé de ses veines.
On ne prétend pas, en 128 pages et quelques dizaines de mots, faire le tour d'une histoire vieille de plus de quatre mille ans.
Le pari ici tenté repose sur des choix radicaux qui permettent de dégager une certaine idée du théâtre. Un désir de théâtre, que l'on voudrait faire partager et qui fait préférer le " silence " au " dialogue ", la " pantomime " au geste ou le " mouchoir " au " corps "... Ainsi a-t-on choisi de ne retenir que quelques entrées, à partir desquelles on tentera de développer une certaine vision théâtrale qui ne prétend pas se substituer à d'autres, mais se propose de dialoguer avec elles à l'occasion d'une promenade entre scène, salle et coulisses.
Comme genre, la pantomime connaît différentes expressions nationales et relève de différentes aires culturelles. Comme principe théâtral, elle transcende les esthétiques et les époques. Le présent volume envisage la question du XVIIe au XXe siècle, en France et en Europe (Grande-Bretagne, Belgique, Allemagne, Autriche ou Espagne) voire aux États-Unis à travers les tournées mémorables des frères Hanlon-Lees. Du ballet de cour au n Nouveau Spectacle Pantomime ", de Cot d'Ordan à Catulle Mendès, des hystériques de Charcot à la démence de Charlot, de Valle-Inclân à Gémez de la Serna, de Schnitzler à Hofmannsthal, ou de François Verret à Jan Lauwers en passant par Vitrac, Genet et Beckett, les études réunies dans ce livre visent à comprendre comment la pantomime s'inscrit au coeur de multiples pratiques spectaculaires, tout en désignant paradoxalement un certain envers du théâtre. Elle oblige ce dernier à articuler texte et hors-texte, logique discursive et logique iconique. Entre une pratique d'écriture et une pratique de l'image où le cinéma des premiers temps trouva les conditions de son épanouissement, elle fait, à sa façon, le lien entre arts du texte et arts visuels et interroge ainsi résolument notre modernité.
Rien de moins sage que certaines images qui, du XIXe au XXIe siècle ne semblent là que pour inquiéter le discours implicite sur lesquels elles s'érigent, et, le faisant trembler, vaciller sur ses bases, l'obligent à se repenser non plus comme vecteur de transmission du monde mais comme écran entre le monde et nous. Des corps aussi affolés qu'affolants s'exposent ainsi dans des "petits" genres comme la pantomime et le tableau vivant, tour à tour défiant les "grands" genres et les revivifiant...
Placé depuis des années dans un asile, Joseph écosse des petits pois, fabrique des sacs, c'est son travail. Mais avant, Joseph était un grand écrivain, d'ailleurs le directeur et le médecin l'incitent à reprendre l'écriture. Mais lui préfère le simple, la lumière, les oiseaux, les cailloux, le détachement absolu. Dans ce roman, Arnaud Rykner s'est inspiré de la vie de l'écrivain suisse Robert Walser, avant de prendre des libertés.
« «Surtout, ne pas penser (.) Juste devenir idiot »» écrivait ce dernier. Un roman bouleversant sur la condition humaine.
C'est une maison de bord de mer, d'un autre temps, qui n'ouvre que pour les vacances. Chaque année s'y retrouvent des enfants, sous le regard d'un homme et d'une femme. Ils sont à cet âge où l'on joue encore à l'enfance. Les bagarres. Les réconciliations. Parmi eux, un garçon solitaire, à la violence mystérieuse. L'été va se terminer plus tôt cette année-là.
Derrière un verrou, une voix se parle et parle à son roi, celui qui lui a expliqué l'univers, les étoiles, mais aussi les pendus, les corbeaux, les géants, l'enfer.
Dans ce royaume de quatre murs, espace de son enfermement, de sa douleur, la petite voix soliloque sans fin à l'adresse de cet autre aimé, haï. Voix bavarde qui lutte sans cesse contre le vide et le silence, mots tricotés, chantés, sans écho. A chacun sa prison, à chacun son roi.
C'est un petit homme bien tranquille, dans sa chambre, au milieu de la ville.
Et voici que des anges viennent rôder autour de lui et en lui. Unjour ce sont des anges facétieux à têtes de clown ; le lendemain des anges aux regards noirs et aux crocs acérés. S'il en jette un par la fenêtre, un autre entre par la porte. S'il les enferme dans son placard, ils resurgissent dans son lit. Mais s'ils disparaissent sans laisser traces ni plumes, voilà que le petit homme ne sait plus marcher, ni dans sa tête ni dans sa ville.
Où iront-ils ainsi, hommes et anges mêlés dans un combat sans merci ?
Une pie ce tendue dans la parole : des personnages (des voix pluto t, des corps pris dans le drame de la langue) disent en leur solitude un mot apre s l'autre le the a tre d'un franchissement. Passer du dedans au dehors nomme ce geste d'e crire et de parler, de signe le the a tre comme ce mouvement me me, radical et physique. Passage de seuil : du silence au vacarme, de l'inte riorite vers le monde pose de l'autre co te de la sce ne ou de la page, du passe a l'imminence de sa de chirure a venir, de la haine a l'amour comme il est impossible de le dire, de l'homme a la femme, et de l'enfant au cadavre, du corps de l'acteur a l'acteur de sa voix. Et en tout, un the a tre qui travaille a l'os du langage : briser les convenances pour en arracher la pre sence et nous la donner.
Lignes de chance est une anthologie poétique dédiée à la chance.
Arnaud Rykner y raconte l'histoire des Espernels, le peuple de la chance, en l'émaillant de poèmes (Robert Desnos, Jacques Prévert, René Char, Ella Higginson.), d'aphorismes (« La chance est le sourire de l'inconnu », Étienne Rey ; « Mieux vaut une once de chance qu'une livre d'or », proverbe yiddish.), de contes. Superbement mis en images par Frank Secka, ce livre réconfortant fait rêver et réfléchir aux bonheurs terrestres. Les illustrations originales jouent sur des références qui vont du surréalisme à la culture pop en passant par la gravure et la lithographie. Un univers visuel dont la richesse est le juste pendant à la beauté du texte.
L'auteur
Elle a pris le nom de Catherine Crachat, l'a volé dans un roman.
Elle est belle et on la dit folle, on dit même qu'elle dépèce ses amants. Mais elle n'est pas folle et c'est ça qui la tue. Alors elle crie en silence, alors elle fuit la ville et les hommes, part au bord de la mer, en Bretagne. Ruines de l'été, plages désertées, hôtels vidés. Des solitudes se croisent. Eblouissement de la rencontre qui ne vient pas, ou si peu, ou pas celle qu'on attend, et pas comme l'on attend.
Homme noyé échoué sur le sable, son corps nu obsédant. Et l'autre corps, vivant, de l'homme entre parenthèses, qui vient se frotter au sien. Seins aussi d'une serveuse, libres sous le tee-shirt. Repli bienfaisant des jours. Et la poussée, dans le ventre de Catherine Crachat, de ce qui ne triche pas.
Des tout premiers tableaux vivants du XVIIIe siècle aux photographies mises en scène du XXIe siècle, des problématiques communes se font jour : codes de représentation, emprunts à divers médiums, part de l'intentionnalité qui préside à leur construction, rôle accordé aux corps qui peuplent la scène ou l'image scénographiée... Le tableau vivant comme la photographie mise en scène se jouent dans l'écart nécessaire qu'ils organisent entre un plan de référence et une plus ou moins forte émancipation, fondant leur dimension artistique. La dimension théâtrale du tableau vivant lui a pourtant peu donné droit de cité sur les planches ; quant à la photographie mise en scène, elle a été longuement ignorée en tant que telle par les théoriciens et les critiques. L'ère des flux et hybridations de toutes sortes permet aujourd'hui la pleine reconnaissance de ces pratiques intensément vivantes et polymorphes.
Avec les contributions de C. Amey, J. Arrouye, Y. Butel, L. Darbellay, M. Debat, M. Debowski, M. Galéa, D. Grojnowski, F. Guerrin, C. Halimi, D. Méaux et alii ; entretiens avec B. Caron, A. Bernardini, S.Skoglund (par A.-L. Bessou).