Il faut se soucier de la démocratie. Les philosophes l'ont bien compris, eux qui, depuis l'Antiquité, ont interrogé ce régime politique où le pouvoir est détenu par le peuple et où chacun, à la fois gouverné et gouvernant, a charge de veiller au bien commun.
Ce régime est-il vraiment le meilleur de tous ? Si le démocrate est d'abord celui pour qui le lien social doit être pensé selon une norme d'égalité, de quelle égalité parle-t-on ici ? Comment la démocratie articule-t-elle liberté de l'individu et souveraineté commune ? Ne contient-elle pas aussi en elle les germes de la tyrannie ?
Alors que la démocratie est en passe de devenir, dans le discours contemporain, un terme vide, visant essentiellement à teinter d'une nuance laudative ce qu'il est supposé qualifier, il est urgent de relire les penseurs qui se sont attachés, fût-ce pour la critiquer, à la questionner et à lui donner sens.
Cette anthologie rassemble les plus grands textes sur la démocratie, de Platon à Habermas, en passant par Aristote, Cicéron, Hobbes, Spinoza, Montesquieu, Rousseau, Kant, Constant, Hegel, Tocqueville, Marx, Arendt, Castoriadis ou encore Rawls.
À travers une analyse de la théorie politique élaborée par Carl Schmitt, dont un texte est ici étudié, l'auteur se propose d'éclairer les enjeux éminemment politiques de cette opération complexe qu'est la prise de décision.
Cet ouvrage renouvelle la lecture de Rousseau par une approche génétique et cherche ainsi à cerner ce qu'est pour lui "raisonner en philosophe". La problématique de l'invention conceptuelle ordonne l'enquête, parce que Rousseau constitue ses orientations essentielles en remaniant, déplaçant, transformant les concepts qu'il reçoit des traditions théoriques auxquelles il entend se confronter, en formant ceux que la constitution de son propre horizon de pensée requiert. La formation des concepts d'association, de corps politique, de gouvernement mixte, de souveraineté, de guerre et d'état de guerre, d'intérêt, est l'objet des deux premières parties. La troisième rend compte de l'invention du concept de volonté générale. Est enfin interrogé le statut de la généralité dans la pensée de Rousseau.
En faisant du consentement la marque de la souveraineté et du libre examen le fondement du devoir moral, la modernité met l'individu à la source de sa propre obligation.
C'est devoir le délier pour qu'il puisse se lier. L'obligation apparaît ainsi comme le principe et le problème constitutif de la modernité politique. Cet essai d'histoire conceptuelle montre comment, de Bodin à Rousseau, dans la tradition jus naturaliste comme chez ceux qui la contestent, la question de l'obligation est la question commune : comment obliger une volonté libre ? L'école du doit naturel, dont les doctrines des droits de l'homme ont hérité, fonde l'obligation politique sur l'obligation morale.
Rousseau lui oppose la double nécessité d'un fondement sui generis de l'obligation politique et de la production sociale du sentiment d'obligation. Alors que s'épuise le pouvoir de cohésion des communautés d'appartenance et que s'avère exorbitant de demander à l'obligation morale de former le lien social, nos sociétés ne sont-elles pas confrontées à la difficulté qu'elles se sont créée : devoir tirer du mode d'existence politique de leurs membres le sentiment du lien sans lequel la société se défait ?
Lorsque l'article Genève paraît dans l'Encyclopédie, Rousseau publie une Lettre à d'Alembert sur son article Genève, réponse foisonnante et virulente qui traite aussi bien du clergé, des moeurs, de l'honneur, des lois, que des spectacles ou des divertissements qui conviennent au peuple genevois.
Pourquoi prend-il ces questions tellement à coeur ? En dépit de ses origines genevoises revendiquées, on ne lui a pas confié la rédaction de l'article. D'Alembert, en s'en chargeant personnellement, sait qu'il attise une polémique. Son Discours préliminaire de l'Encyclopédie visait déjà à réfuter le Discours sur les sciences et les arts. L'article sur Genève présente la cité calviniste comme un exemple de liberté politique et religieuse mais critique des restes d'obscurantisme que la lumière philosophique doit dissiper : il suggère des réformes, notamment la levée de l'interdiction d'un théâtre permanent.
D'Alembert imagine ce qu'il nomme une "cité philosophe", où fleuriraient à la fois la liberté de la république et les raffinements culturels des grandes monarchies. Or ce projet résume tout ce que Rousseau, depuis le premier Discours, dénonce comme une illusion. Sa Lettre approfondit la démonstration : le théâtre comme école de l'hypocrisie, le bel esprit, la civilité telle qu'on la conçoit à Paris sont inconciliables avec les moeurs de véritables citoyens.
Ses thèses sur les spectacles ne sont qu'un aspect de sa réflexion sur la modernité : à quelles conditions la république est-elle possible ? Comment lier adéquatement morale, esthétique et politique ? Les études réunies dans ce volume éclairent les enjeux et les logiques complexes d'un texte que son auteur, alors malade et croyant vivre ses derniers jours, a rédigé comme s'il devait s'agir de son testament philosophique.