Les Mémoires d'outre-tombe ne furent point publiés comme Châteaubriand l'avait d'abord souhaité. Dans l'Introduction à la présente édition, Maurice Levaillant expose pourquoi et comment, malgré la conscience des mandataires du grand écrivain, malgré leur fidélité à l'amitié et à l'honneur, le texte offert au public n'était pas tel qu'il aurait dû paraître dans l'édition originale. En établissant cette édition d'après l'édition originale et les deux dernières copies du texte, Maurice Levaillant et Georges Moulinier se sont proposés de «restituer aux Mémoires d'outre-tombe le texte et l'aspect qu'iIs auraient dû présenter dans l'édition originale ; de rendre ce texte aussi clair, aussi accessible et maniable que possible pour les étudiants et pour tous les lettrés», et de le compléter par des variantes, des notes, un appendice et un index. «On souhaite d'avoir réussi à placer dans une lumière plus favorable un ouvrage qui n'est pas seulement le chef-d'oeuvre de Châteaubriand, mais l'un des grands livres du XIXe siècle; oeuvre où la poésie et l'histoire s'entremêlent ; dans un miroir magique, à travers l'âme exigeante et orageuse de Châteaubriand, se reflètent l'âme même d'une époque et, de 1780 à 1840, soixante ans d'histoire de France.»
Les Mémoires d'outre-tombe ne furent point publiés comme Châteaubriand l'avait d'abord souhaité. Dans l'Introduction à la présente édition, Maurice Levaillant expose pourquoi et comment, malgré la conscience des mandataires du grand écrivain, malgré leur fidélité à l'amitié et à l'honneur, le texte offert au public n'était pas tel qu'il aurait dû paraître dans l'édition originale. En établissant cette édition d'après l'édition originale et les deux dernières copies du texte, Maurice Levaillant et Georges Moulinier se sont proposés de «restituer aux Mémoires d'outre-tombe le texte et l'aspect qu'iIs auraient dû présenter dans l'édition originale ; de rendre ce texte aussi clair, aussi accessible et maniable que possible pour les étudiants et pour tous les lettrés», et de le compléter par des variantes, des notes, un appendice et un index. «On souhaite d'avoir réussi à placer dans une lumière plus favorable un ouvrage qui n'est pas seulement le chef-d'oeuvre de Châteaubriand, mais l'un des grands livres du XIX? siècle ; oeuvre où la poésie et l'histoire s'entremêlent ; dans un miroir magique, à travers l'âme exigeante et orageuse de Châteaubriand, se reflètent l'âme même d'une époque et, de 1780 à 1840, soixante ans d'histoire de France.»
Coffret de deux volumes vendus ensemble, réunissant des réimpressions récentes des premières éditions (1947, 1950)
Cette édition s'efforce de présenter les écrits purement littéraires de Chateaubriand dans un ordre à la fois chronologique et thématique. Ainsi le lecteur pourra relire un écrivain qui ne fut pas seulement chantre de sa propre désespérance et du néant, artiste frileux réfléchissant sur son art, historien consciencieux, mais aussi le plus intraitable génie contestataire. Toute son oeuvre en effet s'insurge contre une religion mal comprise qui mutile l'homme, contre une fausse civilisation égoïste et cruelle qui monopolise morale et culture. Reflet de son temps, Chateaubriand l'est également du nôtre. Le texte a été établi d'après celui des Oeuvres complètes parues chez Ladvocat. On a consulté les manuscrits accessibles et découvert des sources de l'oeuvre qui s'ajoutent, nombreuses, à celles que nous connaissions déjà, surtout à propos des Martyrs et du Voyage en Amérique. Cette édition devient ainsi un instrument de travail enrichissant et suggestif.
Cette édition s'efforce de présenter les écrits purement littéraires de Chateaubriand dans un ordre à la fois chronologique et thématique. Ainsi le lecteur pourra relire un écrivain qui ne fut pas seulement chantre de sa propre désespérance et du néant, artiste frileux réfléchissant sur son art, historien consciencieux, mais aussi le plus intraitable génie contestataire. Toute son oeuvre en effet s'insurge contre une religion mal comprise qui mutile l'homme, contre une fausse civilisation égoïste et cruelle qui monopolise morale et culture. Reflet de son temps, Chateaubriand l'est également du nôtre. Le texte a été établi d'après celui des Oeuvres complètes parues chez Ladvocat. On a consulté les manuscrits accessibles et découvert des sources de l'oeuvre qui s'ajoutent, nombreuses, à celles que nous connaissions déjà, surtout à propos des Martyrs et du Voyage en Amérique. Cette édition devient ainsi un instrument de travail enrichissant et suggestif.
L'Essai sur les Révolutions et le Génie du christianisme sont deux oeuvres surprenantes qu'on ne dirait pas sorties de la même plume, tant elles sont faites d'oppositions. Ce sont les deux premières publications de Chateaubriand, et la seconde semble la réfutation de la première. Elles divergent dès leur naissance et dans leur destin. Écrit à Londres par un émigré besogneux et solitaire séduit d'abord par le rêve de 1789, puis effrayé de certaines conséquences, l'Essai sur les Révolutions passa presque inaperçu. S'il fit, comme le dira son auteur, du bruit dans l'émigration, ce fut le bruit d'un scandale, qu'on amortit bien vite. Le Génie du christianisme, au contraire, connut avant même sa publication un succès qui dure encore à notre époque. Achevé à Paris par un écrivain qui marchait dans la cohorte du Premier consul, il s'accordait parfaitement avec la situation politique de l'heure et le désir des Français. Cinq ans seulement séparent ces deux écrits. Ce peu d'années a suffi pour que Chateaubriand passe de l'incertitude et du désespoir aux certitudes d'un ordre social qui s'organise, de l'irréligion à la religion.
En 1814, au retour des Bourbons, Chateaubriand avait manqué son entrée dans la vie politique. Sa fidélité pendant les Cent-Jours lui valut les titres de ministre d'État et de pair de France. Déçu de ne pas jouer un grand rôle, il écrit De la monarchie selon la Charte, ouvrage qui est saisi et lui fait perdre son titre. Sans ressources, sa bibliothèque vendue aux enchères, la Vallée-aux-Loups mise en loterie, il connaît un répit avec la fondation du Conservateur qui lui assure quelques ressources. Mais il doit attendre 1820 pour que Louis XVIII se rapproche des ultras et l'envoie comme ministre plénipotentiaire à Berlin. Durant cette période, Mme de Duras reste la confidente privilégiée. Mais déjà se profile une rivale qui va bientôt prendre le pas sur elle, Mme Récamier. On sait que Juliette a fait détruire les lettres de Chateaubriand. L'indiscrétion de la police secrète et l'indélicatesse d'un secrétaire occasionnel de Chateaubriand nous valent de pouvoir présenter quelques-unes des lettres de Juliette, parmi les plus révélatrices de la passion qu'elle nourrit pour René.
Après l'installation de la monarchie de Juillet, Chateaubriand semble promis à des jours obscurs et laborieux qui lui permettent d'achever ses Études historiques en avril 1831. Refusant la France de Louis-Philippe, il s'exile à deux reprises en Suisse pour travailler en paix à ses Mémoires, mais les événements le précipitent de nouveau dans l'arène. Défenseur des Bourbons bannis et humiliés, conseiller attitré de la duchesse de Berry qui l'entraîne malgré lui dans sa folle aventure, il publie de mars 1831 à novembre 1832 quatre brochures étincelantes et immédiatement célèbres qui le désignent à la vindicte de Louis-Philippe. Emprisonné pendant deux semaines à la préfecture de police en juin 1832, le chef du parti légitimiste en ressort avec l'auréole du martyr. En 1833, l'ambassade de la fidélité le conduit auprès de Charles X à Prague où il assiste à la proclamation de la majorité royale du jeune duc de Bordeaux, le 29 septembre. Cependant l'écrivain, obligé de «traduire du Milton à l'aune» pour vivre, organise en 1834 à l'Abbaye-aux-Bois des lectures de ses Mémoires, formidable opération publicitaire à l'attention des éditeurs. La même année, la création malencontreuse de Moïse au théâtre de Versailles, sans son agrément, lui vaut pourtant un succès d'estime. Malgré une intense activité politique et littéraire et sa relation fusionnelle avec Mme Récamier, René ne se résigne pas à la vieillesse qui le talonne. Pour rester jeune, il faut se sentir aimé. S'il rompt avec l'extravagante Mme de Pierreclau devenue par trop encombrante, il écrit ses dernières lettres d'amour, peut-être les plus belles, à Hortense Allart, «dernière Muse, dernier enchantement, dernier soleil».
Tome VII : 6 juin 1824 : Chateaubriand est renvoyé du ministère des Affaires étrangères comme s'il avait «volé la montre du roi sur la cheminée». Dès lors, il devient l'ennemi implacable du gouvernement Villèle. Champion de la lutte pour toutes les libertés, en particulier celle de la presse, il devient en 1827 l'adversaire attitré de «la loi de justice et d'amour».Les années 1825-1827 sont aussi celles où l'écrivain désargenté se remet au travail, révisant et complétant ses ouvrages pour une édition des Oeuvres complètes, qui paraissent chez Ladvocat à partir de juin 1826. En 1826, précisément, il part avec Mme de Chateaubriand à Lausanne pour y chercher une retraite studieuse ; il y fait la connaissance de Rosalie de Constant et de la jeune et jolie Laure de Cottens.En vérité, cette vie vouée à la politique et au travail serait bien austère si des liaisons amicales ou amoureuses ne venaient l'éclairer. Les lettres envoyées à son ancienne maîtresse, Cordélia de Castellane, en voyage en Italie, sont parmi les plus riches et les plus intéressantes qu'il ait écrites. Mais une autre favorite fait son entrée dans la Correspondance : Mme de Pierreclau reçoit de nombreux billets, inédits pour la plupart, attestant une assiduité et une intimité qui ne se démentiront pas jusqu'en 1832.
De Berlin, où, au début de l'année 1821, il a été relégué dans une sorte d'exil doré, avec le titre de ministre de France auprès du roi de Prusse, Chateaubriand multiplie avertissements et mises en garde, tant à l'adresse de ses amis politiques que du gouvernement lui-même. Il se permet d'envoyer des conseils à son ministre, le baron Pasquier, qui note avec irritation : «C'est Gros-Jean qui remontre à son curé.» Au bout de trois mois, pensant avoir assimilé toutes les finesses de la diplomatie, Chateaubriand se fait mettre en congé. À Paris, il tombe en pleine crise ministérielle, démissionne par solidarité avec les ministres ultraroyalistes Villèle et Corbière. Ses lettres à Mme de Duras font revivre cette crise politique, son dépit de ne pas être du nouveau cabinet, sa joie d'être nommé à l'ambassade de Londres. Les lettres à Mme Récamier font cruellement défaut, car Juliette les a fait disparaître. Les seconds rôles féminins sont tenus par les habituelles correspondantes : Mme de Custine, Mme de Pisieux, Mme d'Orglandes, Mme de Montcalm... Nouvelles venues : une princesse de sang presque royal, la duchesse de Cumberland, et encore la mystérieuse inconnue à laquelle Chateaubriand écrivait, le 16 août 1821 : «J'ai attendu ; vous ne me donnez pas signe de vie. Est-ce fini entre nous ? Je ne puis le croire.»
Des trois séjours que Chateaubriand fit en Angleterre, successivement comme émigré, comme ambassadeur du roi de France et, pour terminer, comme pèlerin de la fidélité, c'est incontestahlement le deuxième, celui de 1822, qui fut le plus spectaculaire ; c'est à lui que nous devons, dans les Mémoires d'outre-tombe, ce tableau pittoresque de la société londonienne au temps du roi George IV ou encore cette évocation pleine de vie, qui se module comme un air d'opéra-comique, de l'existence harassante d'un diplomate accablé par ses obligations mondaines, face à une demi-douzaine de jeunes secrétaires d'ambassade qui semblent n'avoir d'autre emploi que de les lui rappeler impitoyablement. On trouvera aussi, dans la correspondance de cette année 1822, les dépêches diplomatiques qu'il se faisait un point d'honneur de rédiger lui-même. Mais bientôt, avec cette facilité qu'il avait de se déprendre des objets les plus ardemment désirés une fois qu'il les avait obtenus, toutes ses forces, tous ses désirs, toutes ses ambitions ne devaient plus se tourner que vers ce seul but : être nommé l'un des plénipotentiaires français au congrès qui allait se tenir à l'automne dans une localité dont le choix n'avait pas encore été définitivement fixé, Vienne, Florence ou Vérone.
Plus de cent vingt ans après la mort de Chateaubriand, il n'existait encore aucune édition d'ensemble de sa correspondance. Il n'est pourtant pas un seul de nos grands écrivains dont les lettres aient plus d'intérêt que les siennes. Elles sont le reflet d'un génie et d'une existence merveilleusement contrastées. On y voit tour à tour le jeune gentilhomme breton au déclin de l'Ancien Régime, le soldat, le voyageur, l'émigré, le philosophe, le chrétien, le «bon garçon» dont parle Joubert, le pamphlétaire, le pair de France, le ministre, l'ambassadeur, le vieillard entouré de ses ombres. On y retrouve le magicien ; on y découvre l'amoureux. Ces lettres traduisent la complexité de son esprit et de son âme, son scepticisme universel et sa confiance en l'homme, son respect du passé et sa divination de l'avenir, ses désirs et son désespoir. Au-delà de sa vingtième annnée, elles sont, en outre, le meilleur, ou plutôt l'indispensable commentaire des Mémoires d'outre-tombe.
Tome VII : 6 juin 1824 : Chateaubriand est renvoyé du ministère des Affaires étrangères comme s'il avait «volé la montre du roi sur la cheminée». Dès lors, il devient l'ennemi implacable du gouvernement Villèle. Champion de la lutte pour toutes les libertés, en particulier celle de la presse, il devient en 1827 l'adversaire attitré de «la loi de justice et d'amour».
Les années 1825-1827 sont aussi celles où l'écrivain désargenté se remet au travail, révisant et complétant ses ouvrages pour une édition des OEuvres complètes, qui paraissent chez Ladvocat à partir de juin 1826. En 1826, précisément, il part avec Mme de Chateaubriand à Lausanne pour y chercher une retraite studieuse ; il y fait la connaissance de Rosalie de Constant et de la jeune et jolie Laure de Cottens.
En vérité, cette vie vouée à la politique et au travail serait bien austère si des liaisons amicales ou amoureuses ne venaient l'éclairer. Les lettres envoyées à son ancienne maîtresse, Cordélia de Castellane, en voyage en Italie, sont parmi les plus riches et les plus intéressantes qu'il ait écrites. Mais une autre favorite fait son entrée dans la Correspondance : Mme de Pierreclau reçoit de nombreux billets, inédits pour la plupart, attestant une assiduité et une intimité qui ne se démentiront pas jusqu'en 1832.
L'année 1828 commence pour Chateaubriand par un deuil cruel celui de Claire de Duras qui s'est éteinte le 16 janvier.
Mais pour l'ancien ministre des affaires étrangères, que de promesses dans le nouveau ministère Martignac, qui lui redonnera peut-être la place qui avait été la sienne dans l'appareil de l'État. Hélas ! l'éternel opposant se heurte à une fin de non-recevoir, qui s'adoucit quand on lui propose l'ambassade de Rome. D'octobre 1828 à mai 1829, le nouvel ambassadeur gagne la confiance de Léon XII, devient le mécène des artistes de la villa Médicis et se rend populaire par le bon goût de ses réceptions et des fouilles archéologiques qui le consolent mal d'avoir renoncé, pour des motifs politiques, à faire représenter sa tragédie Moïse à Paris.
Le 10 février 1829, Léon XII meurt brutalement et. dans le conclave qui s'ouvre pour nommer son successeur. Chateaubriand trouve une occasion majeure de déployer son activité diplomatique. Le cardinal Castiglioni, l'un des favoris du gouvernement français. est élu sous le nom de Pie Vlll et Chateaubriand exulte. Mais la nomination au secrétariat d'État du cardinal Albani, une créature de l'Autriche, contrarie si vivement le ministère qu'il adresse à Chateaubriand une lettre de reproches que l'ambassadeur prend très mal.
Usant du congé qu'il avait demandé, il quitte Rome pour Paris, où il retrouve Mme Récamier, sa confidente des bons et des mauvais jours. Il rencontre aussi pour la première fois Mine de Nichet et Léontine de Villeneuve, avec lesquelles il entretenait une correspondance amoureuse depuis plus d'un an. Tandis que Chateaubriand hésite à retourner à Rome, la formation du ministère Polignac, en août 1829, lui fait donner sa démission d'ambassadeur.
En 1830. les ordonnances de Juillet et les Trois Glorieuses qui changent le destin de la France trouvent Chateaubriand fidèle à son engagement légitimiste. Après avoir prononcé son discours d'adieu à la Chambre des pairs, il croit sa carrière politique finie et, ruiné, sans illusions, songe à quitter la France pour continuer la rédaction de ses Mémoires, enrichis par les expériences des trois dernières années.
Chateaubriand a toujours su exploiter ses attachements féminins, ce que confirment les correspondances inédites de ce volume adjacent à la Correspondance générale. Avec Delphine de Custine, amie de Mme de Staël, Chateaubriand vit une liaison orageuse et passionnelle ; les lettres de l'amante exaltent le désir et la sensualité. Avec Claire de Duras, une amitié aristocratique se noue. Femme du monde, en tant qu'épouse du duc de Duras, premier gentilhomme de Louis XVIII, elle est aussi une femme de lettres, auteur de trois romans-nouvelles (Ourika, Édouard et Olivier). Mme de Duras tient un salon sous la Restauration et ne cessera jamais de soutenir les ambitions littéraires et politiques de Chateaubriand, pour qui elle est une soeur à l'inceste sublimé.