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" Enfant, je faisais des tableaux d'animaux, j'allais dessiner au jardin des plantes avec ma soeur, un tableau par jour, des flamants roses qui s'envolaient, des scènes rêvées... " Dans ce propos tiré d'un entretien avec le journal Libération en 1978, Gilles Aillaud souligne la découverte dès l'enfance de son thème de prédilection. Des animaux enfermés dans les zoos, puis en liberté dans la savane, des paysages de Bretagne et de Grèce, voilà ses sujets. Des sujets qui ne demandent pas à être peints, qu'il traite sans intention allégorique, sans affect et a fortiori sans message. Plutôt une expérience poétique du monde, faite de disponibilité à ce qui existe, d'attention à la profusion de ce qui est. Tout le contraire de l'indifférence.
Gilles Aillaud est né en 1928 à Paris - et disparu en 2005 à Paris, à la fois peintre, dessinateur, scénographe et écrivain. En 1947-1948, il suit des études de philosophie, puis revient à ses pinceaux. De cette époque, il gardera le goût des mots en publiant des poèmes, des textes critiques et deux pièces de théâtre : dont Vermeer et Spinoza jouée au Théâtre de la Bastille en 1984. Dès lors, son ami Jean-Christophe Bailly l'invite à écrire en 1985, pour les éditions Hazan, un texte consacré à Vermeer, à l'occasion de la publication d'une grande monographie du Maître hollandais, Voir sans être vu. Ce texte est ici réédité, accompagné de quarante reproductions : dessins, aquarelles, lithographies et peintures, offrant des clefs pour redécouvrir cette oeuvre.
"Ils m'appellent tyran. Si je l'étais, ils ramperaient à mes pieds, je les gorgerais d'or, je leur assurerais le droit de commettre tous les crimes, et ils seraient reconnaissants. Quoi qu'il en soit, voilà au moins six semaines que ma dictature est expirée, que je n'ai aucune espèce d'influence sur le gouvernement : le patriotisme a-t-il été plus protégé ? Les factions plus timides ? La Patrie plus heureuse ?" Robespierre
Peintre des zoos, membre de la Figuration narrative, meurtrier symbolique de Marcel Duchamp, président du Salon de la Jeune Peinture de 1965 à 1969, décorateur pour le théâtre, philosophe, poète, dramaturge?: les catégories qui décrivent le travail de Gilles Aillaud sont aussi ce qui empêche d'y accéder. S'en affranchir suppose moins un effort qu'un suspens devant son oeuvre. Ses tableaux et ses écrits produisent eux-mêmes cet arrêt. Tandis que ses articles politiques des années soixante s'engagent dans la lutte des classes, les essais critiques et les poèmes qu'il publie après le reflux idéologique des années soixante-dix établissent une relation directe avec les choses. Alors que les premiers cherchent à opposer d'autres notions à celles de la culture bourgeoise, les seconds délaissent les concepts organisateurs. Cette évolution n'est pas un abandon du projet socialiste, mais un élargissement de sa portée, un approfondissement de ses conditions. Ouvrir les yeux, réfléchir au sens que prend l'histoire, se focaliser sur le soubassement relationnel qui préexiste au lien social, est à la fois ce qui anime Gilles Aillaud avant Mai 68 et ce sur quoi il se concentre particulièrement dans la suite de son oeuvre. Et c'est aujourd'hui, où les activités dominantes emportent tout dans le chaos, notre propre urgence. Sont réunis dans la première partie de cet ouvrage tous les articles politiques de Gilles Aillaud, ses essais philosophiques, ses écrits de catalogue, un choix de poèmes et de proses poétiques concernant l'art, ainsi que la transcription de quatre manuscrits inédits. N'y sont pas reprises ses contributions à L'Encyclopédie de tous les animaux y compris les minéraux, ni ses pièces de théâtre, ni la plupart de ses poèmes. La seconde partie réunit d'abord les entretiens les plus importants dans lesquels Gilles Aillaud aborde son travail de peintre et de décorateur de théâtre, puis en annexe les principales réactions suscitées par le meurtre symbolique de Marcel Duchamp. En tant que président du Salon entre 1965 et 1969, Gilles Aillaud est l'auteur des éditoriaux des quatre premiers numéros du Bulletin de la Jeune Peinture. Comme les autres articles du journal, ils n'étaient pas signés, par rejet de l'individualisme.
Ce livre est publié à l'occasion de l'exposition Y compris les animaux, peintures et dessins de Gilles Aillaud, au musée de la Chasse et de la Nature du 31 mars au 30 juin 2009.