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Grasset
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? On pourra chercher tant qu'on voudra à tourner la difficulté, fréquenter les cafés philosophiques et les lieux initiatiques en tout genre, rien n'y fera : il est impossible d'entrer vraiment dans la philosophie si l'on ne prend pas le temps de comprendre en profondeur au moins un grand philosophe. ?C'est dans cette perspective que Luc Ferry offre au lecteur une introduction aux trois ouvrages majeurs de Kant - ses trois Critiques - qui correspondent à la théorie de la connaissance, à la morale et à l'esthétique. Il a cherché à lui ouvrir quelques portes, à lever les principaux obstacles qui peuvent entraver d'entrée de jeu la compréhension - expliquer, par exemple, pourquoi la Critique de la raison pure commence par une question en apparence technique, d'un intérêt très médiocre, celle des « jugements synthétiques a priori » ; ou encore, indiquer les raisons pour lesquelles la morale prend la forme d'un « impératif catégorique », dès lors que le propre de l'homme, ce qui fait sa dignité et le distingue des animaux, est situé dans sa liberté ou dans sa « perfectibilité ». ?Par delà le travail d'introduction proprement dit, ce livre propose une interprétation d'ensemble du système kantien qui part de ce qui en constitue à la fois le coeur et la principale difficulté : la question de la chose en soi. Lire Kant est et restera toujours difficile et ce livre ne prétend pas à la facilité. Du moins peut-on s'efforcer de rendre la tâche tout à la fois plus sensée, en souligant les enjeux, et moins ardue, en donnant les clefs de l'édifice. Le jeu, comme on dit, en vaut la chandelle ? ?
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Le nouvel ordre écologique ; l'arbre, l'animal et l'homme
Luc Ferry
- Grasset
- 23 Septembre 1992
- 9782246468110
Le débat est déjà rituel : les uns dénoncent dans l'écologie la résurgence archaïque du gauchisme, voire du fascisme des années trente. D'autres y décèlent en revanche un de ces "grands desseins" novateurs qui font si cruellement défaut aux partis traditionnels. Mais que sait-on, au juste, des arrière-fonds idéologiques de l'écologie ? Qui se souvient encore du contexte intellectuel dans lequel l'Allemagne nazie élabora les premières grandes législations sur la protection de la nature (1935) et des animaux (1933) ? Quels sont, aujourd'hui même, les motifs philosophiques et politiques des courants fondamentalistes qui, aux Etats-Unis et en Europe du Nord, exigent avec le plus grand sérieux un droit des arbres, des îles et des montagnes ? Pourquoi leurs revendications prennent-elles la forme d'un antimodernisme radical, d'une "déconstruction de l'Occident en déclin" ? Quels sont les arguments développés en faveur d'un droit des bêtes par les millions de sympathisants du "mouvement de libération animale" ? Questions cruciales s'il ne s'agit pas de plaider contre une éthique de l'environnement, mais bien pour son alliance avec la démocratie.
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Cet essai - qui fait suite à L'Homme-Dieu et à La Sagesse des Modernes - tente de répondre à la question qui lui sert de titre. En effet, depuis la naissance de la philosophie, la question de la « vie bonne » est au centre des interrogations humaines, mais Luc Ferry observe que la façon d'y répondre dépend de la vision du monde où elle s'inscrit. A cet égard, il distingue trois grandes problématiques :
1 - dans les mondes théologico-religieux, « réussir sa vie » revient à trouver sa place à l'intérieur d'un ordre transcendant et, pour reprendre la terminologie de l'auteur, « hétéronomique » (la loi est extérieure au sujet qui s'y soumet).
2 - Avec l'avénement des « mondes désenchantés », et avec l'avénement de l'individualisme démocratique, la question de la « vie bonne » se pose différemment - puisqu'il s'agit, désormais, de régler son salut sur des finalités non transncendantes (c'est ce que Ferry nomme, avec d'autres, « l'âge d'autonomie »).
3 - Or, que reste-t-il de cette « sotériologie » - c'est-à-dire : l'art d'accomplir son salut - à l'âge de la mort de Dieu et de la disparition des grandes eschatologies - fussent-elles laïques ? A partir de cette périodisation, Luc Ferry passe en revue les grands types de réponses fournies par les philosophes et les religions. Les Stoïciens, Nietzsche, le christianisme - mais aussi les peintres hollandais ou les écrivains bohèmes du XIXe siècle - illustrent cet ouvraged'une richesse et d'une fécondité remarquables. Le dernier chapitre de cet ouvrage répond, plus personnellement, à la question qu'il pose. Dans cet ultime chapitre, Luc Ferry éclaire d'un jour singulier son propre itinéraire d'intellectuel et, désormais, d'homme d'action. -
Luc Ferry réfléchit, dans ce livre, aux conditions dans lesquelles s'organise un nouvel ordre éthique dans des sociétés qui ont accompli leur "révolution religieuse". A distance des interprétations trop étroites de la morale laïque, il montre comment le long processus par lequel le divin se retire de notre univers social et politique s'avère être, en fin de compte, un processus de sacralisation de l'homme lui-même qui conduit vers de nouvelles formes de spiritualité. On peut repérer ce mouvement dans bien des domaines. Le développement de l'action humanitaire témoigne par exemple, de l'émergence d'une aspiration nouvelle qui ne se confond pas avec les formes traditionnelles de la charité, mais qui revient pourtant à reformuler la problématique du don de soi. La tendance à la "sacralisation du corps humain" conduit, de son côté, à poser dans des termes neufs toute une série de problèmes que tente actuellement d'explorer la bioéthique. Le "désenchantement du monde" tend ainsi à une nouvelle formulation de la question de la transcendance dans les sociétés modernes.
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Avec leurs expositions sans tableaux ou leurs concerts de silence, les avant-gardes finissantes ont tourné les formes traditionnelles de l'art en dérision et annoncé à leur insu l'éclectisme "postmoderne" : à défaut de choquer ou de subvertir, les oeuvres en sont venues à exprimer la vision du monde propre à leur créateur plus que le monde lui-même. L'acosmisme de l'esthétique contemporaine apporte une singulière confirmation à la thèse nietzschéenne selon laquelle la vérité de l'art résiderait dans la subjectivité de l'artiste ; les "produits culturels" tendent à devenir des cartes de visite élaborées - le rapport à la réalité objective étant dès lors le monopole des sciences positives. Comment cet étrange partage des rôles qui domine toute la culture démocratique en est-il venu à s'instaurer ? C'est une longue histoire, qui commence au milieu du XVIIe siècle avec l'invention de la notion de goût : véritable révolution aux termes de laquelle, pour la première fois sans doute dans l'histoire de l'humanité, l'essentiel de l'art consiste à plaire à la sensibilité subjective. Mais si le beau est affaire de goût, comment pourrait-il faire l'objet d'un consensus ? Comment penser des règles communes dans un univers qui sacralise la volonté des sujets ?
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Ici, la vraie question ne sera plus de savoir si Martin Heidegger fut, ou ne fut pas, le complice philosophique des nazis. Ne serait-il pas plus raisonnable, dès lors, de se demander pourquoi et comment les intellectuels français n'ont pas osé, depuis trente ans, désacraliser une pensée si fermement enracinée dans son refus de la culture démocratique ? Plus encore : Heidegger fut-il, pour nos Modernes anti-modernes, l'ultime caution disponible après l'effondrement des marxismes ? Et ses principales thèses n'ont-elles pas fourni, à l'insu de tous, la matrice dans laquelle des intellectuels en mal de références ont voulu forger leurs slogans et leurs aversions d'époque ? Tel est donc l'objet de ce livre : refaire, à partir d'une oeuvre désormais suspecte, le chemin d'une histoire de l'esprit français et de ses aveuglements. Sur ce chemin, les auteurs rencontreront, bien sûr, la plupart des débats contemporains - du refus de la modernité à la critique soixante-huitarde de nos sociétés, de la haine de la technique à l'anti-humanisme obsessionnel de certains maîtres penseurs. On aura compris que, par-delà le philosophe de Etre et Temps, et par-delà ce qu'il appela lui-même sa "grosse bêtise", ce livre analyse d'abord les singulières naïvetés des intelligentsias qui n'ont jamais pu résister au plaisir de s'égarer.
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Philosopher à 18 ans ; faut-il réformer l'enseignement de la philosophie ?
Luc Ferry, Alain Renaut
- Grasset
- 19 Mai 1999
- 9782246589310
L'enseignement de la philosophie est-il en "crise" ? On ne saurait, en tout cas, continuer d'écarter les faits car ils sont têtus et parlants : plus de 70% des élèves obtiennent au baccalauréat une note inférieure à 10. A l'agrégation, concours suprême de recrutement des professeurs, la moyenne à l'écrit n'atteint pas les 5/20 malgré de longues années d'études après le bac. Lors de la dernière session, sur 1400 copies de la première épreuve... 6 seulement ont obtenu plus de 12/20 !
Ces données brutes sont d'autant plus navrantes que les finalités de la philosophie et de son enseignement sont plus légitimes que jamais : en un temps où la vitesse de la communication l'emporte si souvent sur la patience du raisonnement, comment ne pas maintenir, et même développer, dès l'adolescence, l'idéal de penser sa vie par soi-même ? N'est-ce pas là la condition même de l'accession à la citoyenneté dès l'âge de dix-huit ans ? Que faire, dans ces conditions, pour que la philosophie cesse d'être la discipline maudite, celle qui fait peur, non par l'audace des pensées auxquelles elle donne accès, mais par la dureté de la sélection qu'elle risque de pratiques plus ou moins arbitrairement ?