Corps minuscule replié sur une part d'infini, où la nacre fait écrin au ressac, le coquillage est depuis toujours l'un des objets naturels les plus fascinants pour l'imagination, indépendamment de ses valeurs symboliques, mythiques ou religieuses. Il offre en particulier une inépuisable source d'inspiration pour l'ornementation. Emblème de l'ailleurs, provenant de contrées inaccessibles, rare et ruineux, il occupe une place de choix dans la culture de la curiosité, telle qu'elle exprime dans les cabinets de raretés des XVIe et XVIIe siècles.
Devenu, avec les grandes expéditions, plus commun, on se met, au siècle suivant, à en tapisser pièces et grottes en d'étranges marqueteries oniriques, toutes en festons et mascarons. En même temps qu'il libère la quincaillerie des souvenirs de vacances en coquillages, le XIXe siècle interprète surtout le thème dans le domaine de la porcelaine - de Paris ou de Minton -, et dans une série de superbes meubles grottes vénitiens qui fascinèrent Matisse.
Enfin l'extrême sens de l'élégance qui distingua une série de créateurs de la première moitié du siècle - de Schiaparelli à Jean-Michel Frank, de Jean Schlumberger à Serge Roche - les amena à réinventer en quelque sorte cette tradition, redonnant à ce motif " rococo " une nouvelle vigueur, de nouvelles valeurs. Valeurs que les créateurs d'aujourd'hui ont su à leur tour reprendre et réinterpréter.
Comme tous les grands inventeurs de formes, Piero Fornasetti a fini par disparaître derrière celles qu'il avait inventées.
Figure essentielle des années cinquante, on lui doit (en particulier au cours d'une fructueuse collaboration avec Gio Ponti) quelques-uns des meubles et objets les plus caractéristiques de cette période, inlassablement reproduits dans les histoires du design et les magazines de décoration. Par-delà même ces réussites incomparables, Fornasetti fut une personnalité versatile, à la tête d'une oeuvre multiforme, embrassant aussi bien l'art graphique que la verrerie, la porcelaine que le tissu, la gravure que le théâtre, le mobilier que la peinture.
Travailleur acharné, il poursuivit souverainement, entre 1935 et 1988, une recherche obstinée, se créant une mythologie personnelle, un monde imaginaire dont il ne cessa, un peu comme Jean Cocteau, de varier les éléments. C'est à ce monde totalement méconnu qu'ouvre le présent ouvrage. Conçu en collaboration avec l'artiste peu avant sa disparition, il embrasse en une série d'étonnants documents et de superbes illustrations tous les aspects d'une oeuvre aussi prolifique que méconnue.
Alors que l'on redécouvre les uns après les autres tous les créateurs du " style cinquante ", il rend justice à l'un des plus riches d'entre eux, créateur d'espaces excentriques, d'images envoûtantes et seul, disait Gio Ponti, à " savoir faire parler les objets ".
Lorsqu'en 1924 Vogue publia une photo d'amateur de Cecil Beaton, personne ne se doutait que celui-ci deviendrait l'un des personnages les plus importants de l'histoire du magazine, à la fois photographe, dessinateur et chroniqueur.
Travaillant d'abord comme caricaturiste, Beaton a réalisé d'inoubliables croquis de la société londonienne et américaine, qu'il accompagnait d'articles ponctués d'accents mondains, mais imprégnés aussi d'humour parfois féroce.
Sa carrière de photographe professionnel a débuté en 1929 chez Vogue, qui allait désormais assurer la célébrité de ses photographies de mode, jusqu'à celles de la Haute Couture parisienne publiées en 1979, quelques mois avant sa mort. En tant que portraitiste, Beaton a côtoyé les personnalités les plus marquantes de l'après-guerre, Picasso, Greta Garbo, Noureev et bien d'autres.
Mais ce livre présente aussi d'autres aspects de son travail, car Beaton a été tour à tour reporter itinérant, correspondant de guerre et photographe officiel de la famille royale britannique. Dans les années 1950-1960, il a signé quelques décors et costumes de théâtre et de cinéma, parmi ceux de la comédie musicale My Fair Lady.
Les 220 illustrations de cet ouvrage préfacé par Patrick Mauriès, représentent un demi-siècle de collaboration entre un grand photographe et le célèbre magazine, qui déclara : " L'appareil photo de Cecil Beaton a fini par symboliser le regard de Vogue sur les années qui passent. " Ce livre a été publié pour la première fois en 1986 sous le titre Cecil Beaton 50 ans de collaboration avec Vogue par les éditions Herscher.