Poète et rien d'autre, Umberto Saba (nait Italien à Trieste en 1883 quand la ville était sous l'Empire austro-hongrois) réussit à vivre et à survivre pendant l'une des époques les plus tragique de l'histoire de l'humanité (deux guerres mondiales en tant que juif) probablement grâce à cette nécessité d'écrire qui est la sienne. Honnête et irrépressible. Chez Saba, la poésie est l'une des fonctions naturelles de l'homme, c'est un évènement naturel. Chaque saison, chaque geste il le confie au papier. Et dans ce recueil de poèmes de la maturité, les paroles se font choses. Toutes simples.
De la vie quotidienne. « Travail », « Petite fontaine », « Bouche », « Lieu cher »... Saba continue et intensifie son travail de polissage et de synthèse - qu'il avait commencé quelques années auparavant, lors de la composition de Paroles (1933-1934), le recueil qui précède Choses dernières (1935-1943) - à la recherche de la plus grande limpidité, formellement et psychologiquement, afin que ces « dernières choses » soient des « paroles » portées à leurs conséquences extrêmes. Ces 43 poèmes sont écrits en 8 ans, la pire période de sa vie, quand il est obligé de se cacher pour fuir la persécution fasciste et nazie. Il doit alors ramasser ses choses pour résister, pour faire face à un sentiment de mort omniprésent, pour se nourrir de souvenirs et émotions passés en les rendant présents et vivants.
Saba a une idée précise du travail du poète qui doit être complétement dédié à la représentation et à la compréhension du monde intérieur et extérieur. Loin de toute école et des avant-gardes, Saba met en scène cet homme du Novecento qui est lui-même mais qui veut toucher tout le monde. Au croisement de l'ancien et du nouveau, l'écriture de Saba est d'une rare originalité.
Claire comme celle de Penna qu'il jalousait, moins sophistiquée que celle de ses contemporains Ungaretti et Montale qui l'aimaient, la plume de Saba, espiègle, se vante de savoir toujours employer la rime immémoriale amore/fiore et faire encore du beau.
Ce volume, paru pour la première fois aux éditions L'Alphée/villa Médicis en 1986, est composé d'un choix de douze « récits-souvenirs » tirés du volume Riccordi-Raconti publié par Mondadori en 1956. Ces textes en prose donnent corps à l'ambition même de Saba, qui souhaitait écrire une autobiographie à demi rêvée, ou ce qu'il appelait un « portrait d'inconnu ». Un premier groupe de récits est placé sous le signe de Trieste : la ville est le décor ou l'arrière-fond du monde merveilleux que l'auteur s'est obstiné à y voir ; un second est dominé par des figures d'écrivains (Leopardi, D'Annunzio, Svevo), par la passion de la littérature dans ce qu'elle a de quotidien et de fabuleux à la fois.
« La lumière de tous les récits (sans parler du ton), écrit Gérard Macé, est la même : celle d'une rêverie où se détachent les silhouettes d'un jeune homme et d'un vieillard, qui ne cessent de s'affronter, de se faire souffrir, et d'implorer un mutuel pardon : ils se nourrissent de Saba lui-même, dont la grande inquiétude est peut-être d'avoir à devenir la figure paternelle ou tutélaire qui le hante. »
- Ecrit en 1953, ce roman longtemps demeuré secret fut publié pour la première fois en 1975 en Italie, près de vingt ans après la mort de son auteur, dans une version légèrement amputée. C'est ici la version intégrale qui est entièrement retraduite.Ernesto raconte l'initiation sexuelle d'un adolescent de seize ans. D'abord avec un homme plus âgé, manoeuvre journalier dans l'entrepôt de farine où il travaillle, puis avec une jeune prostituée, enfin avec un garçon à peine plus jeune que lui. En révélant publiquement, avec la voix d'innocence et d'insolence mêlées qui caractérisaient ses poèmes, cette part intime de sa vie, Saba risquait de changer son image publique. Elsa Morante soulignait la " sympathie amoureuse " avec laquelle Saba décrivait le monde, les autres, lui-même. Et à propos d'Ernesto : " Il s'y raconte les premières expériences érotiques (amoureuses) d'un garçon : lesquelles prennent naissance, par hasard, dans une de ces relations que, quoique réelles et humaines, en tout cas naturelles, la superstition considère, sous cette forme, comme tabou. Le garçon de Saba, par sa grâce, est indemne de certains tabous, responsables de transformer les réalités naturelles en monstres absurdes et criminels. Alors que pour d'autres, contaminés par ces tabous, une telle expérience pourrait se transformer en une détermination irréelle (qui pourra faire d'eux les esclaves perpétuels d'une irréalité), pour le garçon de Saba elle reste ce qu'elle est : une simple rencontre humaine, qui, en soi, est innocente (puisqu'il n'en est pas corrompu) et n'est pas maléfique. Emporté par son innocente sensualité, et par sa curiosité spontanée de la vie, ce garçon idéal, de même qu'il est passé à travers sa première expérience occasionnelle, connaîtra ensuite naturellement l'amour des femmes, aura une femme aimée, etc. " - Umberto Saba (1883-1957) est considéré comme le plus grand poète de Trieste et, assurément, un des plus grands poètes italiens du XXe siècle. Son Canzoniere, paru peu après la guerre, a fait immédiatement figure de classique. Mais son oeuvre en prose recèle des chefs-d'oeuvre de raffinement, d'insolence, de profondeur. La quasi-totalité de ses livres a été traduite en français à l'Age d'Homme, chez Rivages et José Corti.
Nouveau choix de poèmes extraits du " Canzoniere " et rassemblés par le traducteur sous le beau titre de Comme on cherche un trésor. Chercheur d'or, certes le modeste libraire de Trieste, Umberto Saba le fut toute sa vie, dans les rues de sa ville natale, et sur les terrains vagues et les stades de football de préférence, avec les habitants et les enfants de son quartier. Dans le siècle tourmenté et cruel, il fait entendre sa voix unique, à la fois douloureuse et simplement limpide, aux côtés de ses amis Montale et Ungaretti qui l'un comme l'autre surent reconnaître très tôt la grandeur de sa poésie.
" des histoires pleines de charme et de maléfices, racontées par un des plus grands champions de la litote.
" françois bott, le monde.
" c'est dans ses nouvelles que saba dévoile le meilleur de son art. une écriture délicatement nuancée dans sa distinction oú pointe une ironie mordante derrière les aphorismes. " anne muratori, le figaro.