À son apogée, au XVIe siècle, l'Empire ottoman s'étendait sur trois continents. Puis il amorça son déclin. Les sultans ne pouvaient moderniser l'empire en préservant les règles théologiques sur lesquelles il reposait. L'Empire ottoman subit les pressions divergentes des puissances européennes puis, au XIXe siècle, miné par l'éveil des nationalismes, l'empire commença à se démembrer et perdit ses possessions européennes et africaines. En rêvant de reconstituer un ensemble turc asiatique, les Jeunes-Turcs précipitèrent son effondrement qui se produisit après la Première Guerre mondiale. La révolution kémaliste préserva l'empire d'une désintégration. Sur ses ruines, Mustafa Kemal édifia une République turque laïque et moderne.
«Malgré l'usage fréquent du terme génocide, le crime commis avec l'intention de liquider l'ensemble d'un groupe humain reste exceptionnel. Le mot même de génocide est récent et l'imprescriptibilité de ce crime selon les lois internationales plus récente encore. Aussi, avec la nouvelle prise de conscience née de l'histoire des dernières décennies, ce que l'on appelait jadis les massacres d'Arménie prend une nouvelle importance.
C'est ce que, dans un excellent livre, exprime avec rigueur et sobriété Yves Ternon, qui a déjà écrit deux ouvrages pour dénoncer la médecine nazie.» Gérard Chaliand
Génocide. Ce néologisme, créé par Rafael Lemkin en 1943 pour signifier la destruction des Juifs d'Europe, assassinés pour ce qu'ils étaient, n'appartient hélas pas au passé. Avant la Shoah, le monde avait été témoin du génocide des Arméniens en 1915 ; plus près de nous, en 1994, les Tutsi furent également les victimes de ces destructions de masse.
Yves Ternon s'est consacré depuis les années 1960 à l'étude de la médecine allemande sous le national-socialisme. Il est depuis devenu un historien de premier plan sur la question du crime de génocide.
Cet ouvrage, qui constitue la synthèse de ses recherches sur la question, est consacré dans un premier temps à « décortiquer » les sources idéologiques, juridiques et historiques ; dans un second temps, aux paramètres ayant conduit à leur application visant à la destruction du peuple arménien de l'Empire ottoman, des Juifs d'Europe et des Tutsi du Rwanda.
La préface de l'historienne Annette Becker revient sur le parcours d'Yves Ternon, parcours ayant abouti à cette réflexion autour de la genèse du racisme biologique et du crime de génocide.
Une réflexion nécessaire à l'heure où le monde est de nouveau plongé dans d'autres formes de violences.
Alors que doivent s'ouvrir les négociations sur l'entrée de la Turquie dans l'Union européenne, la question du génocide arménien revient en pleine actualité. Dans son "enquête", Yves Ternon décrypte le processus infernal qui, de la préméditation à l'organisation du crime, assure à la fois une parfaite exécution de l'anéantissement d'un peuple et l'impunité d'un État responsable. Le livre se fonde principalement sur l'analyse des documents officiels, notamment les télégrammes de l'administration turque recueillis par Aram Andonian à Alep, l'un des centres de regroupement des convois de déportés, et initialement publiés en 1920. La lecture de ces télégrammes confrontés aux autres témoignages directs mettent en lumière l'intention formulée par les dirigeants jeunes-turcs, le plan d'extermination et de déportation des Arméniens, les modalités d'exécution (grâce à une Organisation spéciale parallèle), autant d'éléments qui répondent parfaitement aux critères établis dans la Convention sur le génocide, rédigée sur la base des travaux de Raphael Lemkin, et votée par les Nations unies en 1948. Cette démonstration minutieuse, enrichie d'éléments comparatifs avec la Shoah, éclaire les mécanismes propres au révisionnisme historique qui, dans le cas arménien, est le fait d'un État : la Turquie.
Ce livre retrace un itinéraire de trente années de collaboration épisodique au quotidien arménien Haratch. Ce sont là vingt articles d'un historien qui, par moments, a besoin de s'exprimer hors de l'enceinte d'une université bridée par des règles de courtoisie et de hausser le ton pour jeter quelques éclats de voix afin d'apaiser son indignation devant le mensonge et la mauvaise foi. Ce sont aussi des hommages rendus en maintes occasions. Ce sont enfin des jalons qui marquent l'évolution du double processus de connaissance et de reconnaissance du génocide arménien, des années de turbulences d'une mémoire arménienne blessée par le négationnisme aussi obsessionnel qu'absurde de la Turquie.
Pendant plus de vingt siècles, les jurisconsultes ont débattu du droit. Traitant des lois naturelles, ils faisaient référence aux principes moraux du monde civilisé et à la nécessité pour les États de s'accorder sur des règles qui leur permettraient de coexister dans la paix. Après qu'Athènes eut ébauché les premières règles d'un droit international privé, Rome rédigea un jus gentium, ensemble des droits accordés aux peuples étrangers, un droit que Justinien codifia pour le monde chrétien.
Au XVIe siècle, le théologien catholique espagnol Vitoria pose la première pierre de l'édifice d'un droit des gens, expression de la renaissance de l'humanisme. Au XVIIe siècle, Grotius fixe les règles de ce droit dans la guerre et dans la paix, alors qu'au terme de la guerre de Trente Ans, la paix de Westphalie tente d'établir un équilibre européen. Les jurisconsultes du XVIIIe siècle incluent le droit des gens dans le droit naturel, puis Vattel, dans un ouvrage écrit en langue française - et non plus en latin - dissocie ces deux droits, au nom de la raison. Les Lumières, les Révolutions américaine puis française, l'Empire napoléonien imposent les principes des droits de l'homme : on commence à parler d'un droit international.
Au XIXe siècle, conscients de la nécessité de contenir les violences de guerre, les jurisconsultes posent les fondements d'un droit pénal international. Au terme de congrès et de conférences, ils les font adopter par de plus en plus de nations. Néanmoins, à la veille de la Première Guerre mondiale qui ouvre un siècle de violences extrêmes, ce droit n'est qu'une ébauche.
Comme le développe Yves Ternon dans cet ouvrage, le droit international est l'oeuvre de ces Pères fondateurs. Pour chacun d'eux, son élaboration se situe dans un espace politique et un mouvement de pensées qui influencent leur oeuvre. Ce droit, ils l'ont construit avec les philosophes, les publicistes et autres témoins de leur temps, tout en demeurant attachés aux intérêts de leur nation.
Le XXe siècle, siècle des génocides ? Les années qui viennent de s'écouler, malgré la mise en oeuvre d'une justice pénale internationale, ne permettent guère l'optimisme. Après tout, les années 1990 resteront marquées du sceau des violences commises en ex-Yougoslavie et du génocide des Tutsi au Rwanda. Le moment est donc venu de s'interroger : les guerres majeures de notre temps conduisent-elles nécessairement au génocide ? La guerre n'est-elle qu'un accélérateur des crimes de masse ou bien doit-on chercher à les expliquer autrement ? Yves Ternon relit ici notamment les trois grands génocides qui ont marqué le siècle écoulé : celui des Arméniens, celui des Juifs, celui du Rwanda. Il dévoile l'alchimie complexe qui mène au massacre. Et pose une question centrale aujourd'hui : la guerre a-t-elle définitivement triomphé du droit ?
Un siècle, trois génocides.
En plus d'une carrière de chirurgien qu'il poursuivra pendant quarante ans, Yves Tournon s'engage dans de nombreuses luttes de libération : guerre d'indépendance de l'Algérie, Mai 68, légalisation de l'IVG... Sa passion pour la justice et la liberté le pousse, dès 1965, à entamer des recherches qui le conduiront à publier trois livres sur les crimes des médecins nazis.
Découvrant l'histoire de l'Arménie et du génocide de 1915, au moment où les Arméniens manifestent contre la négation de ce génocide par le pouvoir turc, Yves Ternon publie plusieurs livres sur le sujet (1977-1981). Comparant le génocide arménien à la Shoah, il participe dès lors aux travaux des Genocides studies et procède à une analyse comparative des violences de masse, qui aboutira à l'écriture de L'État criminel (1995).
La perpétration du génocide des Tutsis au Rwanda (1994) le conduit à poursuivre cette approche comparée des génocides au XX e . Avec ces travaux, Yves Ternon permet de partager en toute fraternité les mémoires de trois groupes humains victimes de la haine raciale et de lutter à leur côté contre le négationnisme.
Sur l'autre versant de sa vie, Yves Ternon délaisse les archives de l'Histoire et recherche dans un vieux meuble encombré de souvenirs les moments de son enfance. Il découvre que les tiroirs ont été vidés par la mort et l'oubli. Il reste quelques photos tachées de larmes, des lettres grignotées, des objets désuets tombant en poussière. En ordonnant des lieux dans sa mémoire, il parvient à recueillir, avant qu'ils ne s'enfuient, des instants de joie et de souffrance et à retrouver, sous l'écorce rugueuse de l'arbre de famille, les colères et les premières révoltes, l'émergence du souci des autres. Alors, il peut, grâce aux mots, fixer ce qui demeure d'un enfant né dans le cadre rigide d'une époque, d'un milieu, d'une éducation très catholique. Un monde dont l'adolescent se prépare à sortir dans la mesure où il parvient à saisir à temps la chance, car celle-ci ne revient guère. Ainsi, il devient ce qu'il veut être : un homme parmi les hommes.
Et d'une campagne de presse qui au-delà de la personne d'un enseignant, posaient la question de l'usage du mot " négationnisme " et les limites de la liberté d'expression. La gravité de l'accusation de négationnisme nécessite un minimum d'accord sur le sens que l'on prête à ce mot et sur son usage en dehors du génocide juif. Est-on, eu droit d'appeler négationniste un auteur qui refuse aux massacres des Arméniens en 1915 et 1916 le qualificatif de génocide sans pour autant assimiler cet auteur aux négationnistes du génocide juif, avec la connotation raciste que suppose cette négation. L'auteur de ce livre pense que, avec les méthodes du comparatisme historique, on petit répondre positivement à cette question. Il reconstitue les temps de cette affaire sans polémique ni provocation. Il permet ainsi de clarifier utilement le concept de négationnisme.
Auschwitz, anatolie, ukraine, phnom penh, butaré : autant de noms évocateurs de souffrance et d'horreur.
Autant de victimes touchées par l'absurdité du mal. comment tenter de comprendre, pourtant, que ces victimes innocentes aient été érigées au rang de coupables ? yves ternon rend ici compte de cette terrible métamorphose, à travers un essai d'histoire comparée des génocides et des crimes contre l'humanité perpétrés au cours du xxe siècle. le génocide est identifié par des caractéristiques précises. dans le meurtre collectif, les victimes sont tuées en raison de leur appartenance à un groupe donné ; le bourreau désigne ses victimes ; il distribue les rôles et ordonne la mise en scène du meurtre.
Mais les victimes portent un vêtement qui dérange : celui de l'innocence, que l'assassin s'acharne à vouloir leur arracher. si le lieu et le temps les séparent, ceux et celles qui ont survécu continuent de communiquer et de témoigner pour comprendre et transmettre une mémoire vive, au risque parfois de juger leur malheur exceptionnel. parce que leur concurrence fait trop souvent le jeu des criminels et des négationnistes, le présent essai plaide donc à la fois pour une histoire comparée des génocides et une solidarité de leurs victimes.
pendant six siècles la maison d'osman imposa sa loi à des dizaines de peuples et de nations.
à son apogée, au xvie siècle, l'empire ottoman s'étendait sur trois continents. puis il amorce son déclin. les sultans ne pouvaient moderniser l'empire, en préservant les règles théologiques sur lesquelles il reposait. l'empire ottoman subit les pressions divergentes des puissances européennes. la russie convoitait ses territoires. l'angleterre tenait à la préserver pour assurer sa route des indes. au xixe siècle, miné par l'éveil des nationalismes, l'empire commença à se démembrer et perdit ses possessions européennes et africaines.
en rêvant de reconstituer un ensemble turc asiatique, les jeunes-turcs précipitèrent son effondrement qui se produisit après la première
guerre mondiale. la révolution kémaliste préserva l'empire d'une désintégration. sur ses ruines, mustafa kemal édifia une république turque laïque et moderne. l'empire ottoman fut un vaste ensemble multiethnique et multiconfessionnel. la turquie n'est pas la seule héritière de cet empire.
aujourd'hui, plus de vingt états ont, dans leur
histoire, un passé ottoman. en restituant à chacun la part de ce passé qui lui revient, ce livre contribue à apaiser des forces irrédentistes et des passions nationalistes toujours vives. il fournit une grille de lecture nouvelle à l'histoire des balkans et du proche-orient.
Rejetant les faux bruits de complot et les légendes sur les «forces obscures», ce livre s'efforce de restituer à l'Histoire ce moujik insaisissable et fascinant qu'était Raspoutine. Homme de Dieu et diable sacré, dévôt et lubrique, séduisant et repoussant, devin guérisseur et débauché impénitent, ce récit est aussi celui de son incroyable influence sur la tsarine Alexandra, alors que l'Empire s'écroule.
Reconnu après une longue lutte de procédure par la sous-commission des Droits de l'homme des Nations unies en 1986 et par le Conseil de l'Europe l'année suivante, et plus récemment par le président américain Joe Biden, le génocide des Arméniens (1915) est toujours nié par l'État turc.
Cet ouvrage éclaire et met en perspective la déportation et les massacres en masse des populations arméniennes d'Anatolie exécutées durant la Première Guerre mondiale par le gouvernement jeune turc.
Le cheminement qui a ramené l'attention sur ce génocide et sa reconnaissance par diverses instances internationales est également décrit et analysé. Enfin, Gérard Chaliand et Yves Témoin, en marge de leurs contributions respectives, ont rassemblé un choix de documents et d'archives allemandes, américaines et britanniques qui établissent les faits et décrivent l'assassinat d'une nation.
Première édition : Complexe, 2006. Une postface inédite fait le point sur les avancées historiographiques et diplomatiques au cours des quinze dernières années.
À travers la narration poignante d'un orphelin sur les sentiers de l'Arménie, cette fiction se veut le journal perdu du peuple arménien. Regroupant près de 400 cartes postales du début du XXe siècle, L'Arménie d'antan appelle le lecteur à redécouvrir un pays doté d'une histoire particulièrement émouvante.
Le xxe siècle aura eu le triste privilège de connaître la barbarie organisée, administrée, étatisée - dont le génocide reste la variante la plus affreuse.
Qu'est-ce qu'un génocide ? cet essai n'est pas un catalogue de l'horreur. il est d'abord une tentative d'intelligibilité face à l' " etat criminel ". on y trouve les faits sur les génocides et autres massacres " génocidaires ", de la shoah aux violences de bosnie et du rwanda. plus profondément, yves ternon, en utilisant les outils des différents spécialistes des sciences humaines, s'efforce de rendre raison du phénomène qui hante notre histoire contemporaine.
Un siècle après le génocide arménien qui a fait 1,2 million de morts, l'Etat turc pratique toujours le négationnisme. Le Mémorial, fruit des recherches de deux spécialistes de la question, rassemble en un projet ambitieux la totalité des connaissances actuelles sous forme d'illustrations, de tableaux démographiques, de fac-similés de textes législatifs originaux et de discours officiels traduits et accompagnés des commentaires et analyses des auteurs.
Il s'organise chronologiquement :
1-" La genèse du processus et le contexte de guerre (juillet 1914-mars 1915) " expose les événements politiques et militaires de la période, les choix législatifs (projet de réforme des provinces) et économiques (campagnes de boycott des entreprises grecques et arméniennes) constituant le creuset qui amènera les premiers massacres puis les premières déportations.
2-" Le génocide des Arméniens de l'Empire ottoman (avril 1915-décembre 1916) " présente la carte générale des axes de déportation et celle des principaux sites d'extermination. Elles sont accompagnées de la description minutieuse, région par région, de la première phase du génocide puis d'un ensemble consacré aux camps de concentration et d'extermination : leur organisation (camps du chemin de fer de Bagdad, camp d'Alep, camp de l'Euphrate), les témoignages de survivants , les sauveteurs.
3-" Après le génocide, éradication et conséquences (1971-1923) " décrit les ultimes massacres dans le Caucase et en Azerbaïdjan persan puis revient sur la fin de l'Empire Ottoman pour se terminer sur les débats, jugements et procès qui se déroulent du côté des bourreaux, la situation des rescapés, des orphelins et le sort des biens abandonnés du côté des victimes.
Regroupant près de 400 cartes postales du début du siècle, L'Arménie d'Antan est une invitation au voyage dans le temps qui offre aux Arméniens et aux amoureux de l'Arménie de redécouvrir leur pays il y a plus d'un siècle. Sur les pas d'un orphelin à la recherche de ses racines, découvrez, au fil des pages de l'Arménie d'antan, l'album d'un peuple dispersé.