Il est ordinaire de traiter la politique par le biais de la notion de pouvoir. Il est plus rare d'inspecter son terrain par la catégorie de l'autorité, dont on prétend parfois constater ou dont on nous prédit la fin. Pourtant, de grands philosophes ont vu que le pouvoir ne fonctionnait jamais qu'en tension avec l'autorité, tout simplement parce qu'il est difficile de contenir le pouvoir à l'intérieur de quelque système légal que ce soit. Le présent livre se propose d'analyser l'autorité en acceptant le détour par un certain nombre de secteurs où elle prend son sens. Il y a une autorité du pouvoir politique, certes, encore qu'il puisse être exercé sans autorité; mais cette autorité des hommes les uns sur les autres, paradoxal produit des intéressés qui s'y soumettent, n'est qu'une des facettes de cette notion qui a son destin propre : il y a une autorité de la raison, des sentiments, des images, des choses mêmes, qui sert de masque à l'autorité intersubjective. Cette destinée propre, nous avons essayé de la suivre à travers la lutte que se livrent les valeurs entre elles et dans laquelle les forces physiques n'avaient pas nécessairement le dernier mot. D'où le choix des auteurs qui nous ont accompagné dans cette réflexion, conduite en marge des analyses indépassables du Léviathan de Hobbes : celui de Lacan, pour le discours de l'inconscient de l'autorité, et celui de John Austin, l'un des plus «évolutionnistes» des auteurs utilitaristes qui incite à penser la souveraineté et la loi en termes d'autorité.
Le présent volume, édité par Jean-François Courtine, rassemble les communications présentées à l'occasion d'un colloque organisé par Jean-François Marquet, en novembre 1994 à l'Université de Paris-Sorbonne.
La publication aujourd'hui presque entièrement achevée de l'ensemble des cours correspondant à la première période de l'enseignement de Heidegger à Fribourg, puis à la période de Marbourg, rendait possible une série de coups de sonde dans cette décennie extraordinairement féconde qui est non seulement celle de la genèse d'être et temps, mais aussi de la distance critique prise vis-à-vis de Husserl, de la redéfinition d'une herméneutique phénoménologique, de la réappropriation de la philosophie grecque.
Dans quelle mesure Etre et temps constitue-t-il le résultat encore instable de cette période de gestation ? Est-ce que le Kantbuch marque un premier achèvement d'un projet qui commence à s'élaborer en 1919 ? Est-ce que le débat avec la logique de tradition aristotélicienne et la détermination de la vérité comme vérité du jugement fournit un solide fil conducteur susceptible de nouer ensemble les principaux problèmes auxquels le jeune Heidegger se confronte avec une stupéfiante énergie philosophique ? Autant de questions auxquelles les participants du présent colloque se sont attachés.
Nikolaj-Frederik-Severin Grundtvig est un penseur danois du XIXe siècle, dont l'oeuvre monumentale a joué un rôle majeur dans l'histoire de la société danoise, en inspirant notamment les créateurs des hautes écoles populaires (Folkehøjskoler) dont l'originalité fait la fierté du système scolaire danois. Or, il n'existait jusqu'alors quasiment aucune traduction française de ses écrits philosophiques sur l'école et sur l'éducation, ce qui a entravé le développement dans l'espace francophone de travaux universitaires sur les fondements de cette « école pour la vie » qui constitue l'apport majeur de Grundtvig à la philosophie de l'éducation. Cette lacune était d'autant plus regrettable que les études comparatives relatives aux systèmes éducatifs européens pointent la grande originalité de l'école du peuple danois (la Folkeskole) et sa capacité à proposer à ses élèves une expérience éducative propre à cultiver des vertus civiques et morales. Cet ouvrage offre ainsi la première édition française commentée des textes essentiels de Grundtvig sur l'école et sur l'éducation.
Choix de textes présentés et traduits par J.-F. Dupeyron, Ch. Miqueu, F. Roy, M. Auchet et O. Korsgaard.
Dans le dialogue philosophique sur le Maître, Augustin soutient devant son fils Adéodat la thèse qu'aucun homme ne peut rien apprendre au moyen du langage. Selon lui, loin de montrer ce qu'ils signifient, les signes ne font qu'avertir celui qui les perçoit de consulter ses sens, sa mémoire ou le " Maître intérieur ", c'est-à-dire la vérité, qui enseigne immédiatement à l'esprit tout ce qu'il peut comprendre.
Le présent commentaire s'attache à éclairer la démonstration d'Augustin en la situant dans l'ensemble de son oeuvre. Il étudie ses emprunts aux principales doctrines antiques de la signification (grammaire ancienne, sémantique stoïcienne, critique sceptique des signes) et montre comment ceux-ci sont refondus dans une oeuvre originale, qui est sans doute le chef-d'oeuvre de l'Antiquité sur le langage. Au-delà de l'horizon antique, la perspective s'ouvre à des thématiques contemporaines. L' " image augustinienne " du langage présentée par Wittgenstein au début des Recherches philosophiques sert de modèle pour apprécier la pertinence de la critique du pouvoir des signes menée dans le Maître, où l'on voit Augustin s'interroger sur la signification des parties du discours ", mettre en évidence la réflexivité du langage et délimiter le domaine de compétence des mots et de la définition ostensive. L'ouvrage reproduit le texte latin établi par K.Daur (Corpus Christianorum, 1970), accompagnée d'une nouvelle traduction française.
La question du réalisme a occupé, dans la seconde moitié du XXe siècle, l'essentiel des débats de la philosophie analytique, qui a ainsi retrouvé certains des soucis de la philosophie traditionnelle.
Mais n'est-ce pas la volonté même d'affirmer ou de justifier un réalisme philosophique qui nous éloigne du réel, du réalisme au sens ordinaire, et nous conduit à cette alternative stérile entre relativisme et naturalisme qui semble souvent dominer les débats contemporains ? C'est la question critique posée par la philosophie du langage ordinaire, telle qu'elle a été définie et pratiquée par Austin et, en un sens, Wittgenstein.
Ce livre voudrait en faire entendre la voix (la " voix de l'ordinaire ") et contribuer ainsi à une meilleure perception de l'histoire de la philosophie du XXe siècle, en rendant tous ses droits, aujourd'hui, à une tradition encore trop méconnue.
Cet ouvrage est destiné aux étudiants des classes préparatoires et des premiers cycles universitaires, auxquels il propose de faire le point sur les principales approches philosophiques du concept de nature, d'Aristote à Merleau-Ponty.
Afin d'éviter tout autant l'émiettement des références que la construction artificielle d'un ordre thématique, et dans le souci de laisser parler les doctrines philosophiques mêmes, c'est-à-dire la diversité réelle des approches qu'elles inventent, il est composé de neuf exposés aussi approfondis et développés que possible sur les moments les plus forts et les plus significatifs de l'histoire philosophique du concept de nature.
Le traité De l'âme d'Alexandre d'Aphrodise est présenté ici dans sa première traduction française. Basée sur un texte grec révisé, la traduction s'accompagne d'une introduction détaillée et d'un commentaire suivi. On découvrira l'érudition phénoménale de l'Aphrodisien, qui met à contribution l'ensemble du corpus aristotélicien pour exposer à grands traits la psychologie du Stagirite. L'objectif est de décrire l'âme qui appartient aux corps périssables, d'expliquer quelle en est la substance et de comprendre quelles sont ses puissances. La discussion se guide sur le traité De l'âme d'Aristote, dont la majorité des chapitres sont utilisés. L'exégèse qui en est faite ne laisse jamais indifférent : on voudrait tantôt porter Alexandre aux nues, tantôt le condamner aux fers. Car certaines de ses interprétations ont profondément choqué les modernes. Par exemple, Alexandre semble croire que l'âme est engendrée par les corps. Il n'accorde pas d'immortalité à l'âme humaine, qui périt en entier et qui ne survit en rien au composé. L'intellect agent et Dieu ne sont pour lui qu'une seule et même chose. Il estime d'ailleurs que tous deux sont 1'" intellect du dehors" que mentionne Aristote dans son traité De la génération des animaux. Au-delà des controverses qu'il a suscitées, le De l'âme d'Alexandre se veut un exposé fidèle de la psychologie d'Aristote, soucieux d'harmoniser la totalité des oeuvres du Stagirite et de défendre la conception hylémorphique de l'âme contre les élucubrations stoïciennes qui font de l'âme un corps.
Ce récent numéro de la revue consacrée aux études heidegeriennes propose un texte inédit de Heidegger, ainsi que plusieurs études (en allemand, en anglais, ou en français) portant sur la phénoménologie herméneutique, la réforme de l'Université allemande, le statut de l'oeuvre d'art, etc.
Ce livre souhaite d'une part distinguer plusieurs figures majeures de l'humanisme occidental généralement confondues sous le terme général d'humanisme. Il entend d'autre part revaloriser une figure particulière de l'humanisme, celle développée au XVIe siècle par Montaigne, qui place la dignité de l'homme dans sa puissance infinie de métamorphose. Cette conception de la dignité humaine a non seulement le mérite de cerner une dignité proprement humaine, mais elle pourrait en outre offrir une alternative intéressante à la notion de «personne», jusqu'ici invoquée comme le critère de la dignité humaine.
Les textes réunis dans ce volume offrent des bases solides pour étudier les rapports entre christianisme et humanisme, en redéfinissant le concept d'humanisme, en lui restituant la complexité que lui confère son histoire, et en revenant sur la notion controversée d'« humanisme chrétien ».
Longtemps considérés comme la seule synthèse de la philosophie leibnizienne, les Nouveaux Essais présentent en fait une pensée empruntant des pistes originales d'analyse et offrant des orientations épistémologiques marquées. Ce sont les tenants et les aboutissants de ce texte auxquels les auteurs ont ici consacré leurs analyses.