Les commandes sur le site internet sont suspendues jusqu'au : 19/08/2022
Rares sont les hommes de la Révolution qui s'intéressèrent au sort des femmes. Et s'ils modifièrent de façon décisive leur statut juridique, ils furent, à l'exception de quelques-uns, beaucoup moins préoccupés par leurs droits civiques.Ceux dont les textes sont réunis ici se réclamaient de l'idéologie républicaine, fondée sur la liberté et l'égalité des citoyens. Mais, pour la grande majorité d'entre eux, à commencer par Rousseau, la femme devait «se borner au gouvernement domestique, ne point se mêler du dehors». À les lire, on voit bien à quel point la proximité, la similitude et la confrontation des sexes leur faisaient horreur. 1789-2022:deux cents ans plus tard, si les femmes sont devenues des citoyennes à part entière, le combat pour la reconnaissance continue.Ce recueil de textes édité par Elisabeth Badinter expose les causes profondes, philosophiques aussi bien qu'événementielles, de cette longue glaciation dans l'évolution de nos moeurs et le rôle mal connu qu'y ont joué les révolutionnaires.
Mars 1772. L'innocent M. Thomas, académicien distingué, publie un Essai sur le caractère, les moeurs et l'esprit des femmes qui déclenche chez ses contemporains - notamment chez Diderot et Mme d'Epinay - une vive polémique. La question, en effet, est d'importance:la femme est-elle le produit de son éducation, ou bien est-elle prioritairement façonnée par les lois de la Nature?Inauguré à l'aube de la Révolution, ce débat entre les points de vue culturaliste et essentialiste a connu la fortune que l'on sait. Il a entraîné dans son sillage une autre interrogation à la pertinence toujours brûlante:la femme est-elle la semblable de l'homme ou reste-t-elle à jamais l'Autre, désirée en même temps que crainte?Ce recueil reproduit le texte de Thomas et les commentaires qu'en firent Diderot et Mme d'Epinay. Il est précédé d'une longue mise en perspective d'Elisabeth Badinter, qui en analyse les implications et la portée pour les lecteurs d'aujourd'hui.
À l'ère des fake news et autres faits alternatifs, il est revigorant de relire ce qu'Umberto Eco avait à dire sur le sujet. Avec sa clarté, et son gai savoir habituels, le grand écrivain italien déconstruit les notions de mensonge, de faux et de falsification, dont il a si souvent joué dans ses fictions. L'humaniste emprunte autant à l'histoire de la logique, à la philosophie du langage qu'à la littérature, pour nous parler d'éthique, de mauvaise foi, d'ironie et d'authenticité. Car encore faut-il connaître la vérité pour mentir tout en disant le faux.
Eco nous rappelle que notre capacité à évoluer dans le monde avec sécurité se fonde sur le contrat social, et que notre meilleur allié contre les mensonges et les falsifications reste le temps puisque - presque toujours - celui qui ment ou falsifie finit par être découvert.
Dans cet essai aussi bref que réjouissant, le grand intellectuel italien nous offre des clés pour démêler le vrai du faux.
Rejoignant l'indignation des jeunes générations, le journaliste et essayiste analyse la faillite des boomers sans concession et propose des solutions disruptives pour que le désastre possible soit un chemin du renouveau.
Entre 1970 et 2020, la France n'a connu ni guerre ni crise majeure : une parenthèse unique dans son histoire.
Pourtant, pendant cette période, les boomers aux commandes du pays l'ont fait passer de la prospérité au déclin. Cette génération égoïste n'a pensé qu'à ses propres intérêts, sans considération pour l'avenir. Et au moment où la démographie se rappelle à nous, le tragique de l'Histoire fait son grand retour. La parenthèse enchantée est désormais fermée, nous voilà au bord du précipice.
François de Closets n'a cessé de condamner dans ses livres à succès la démagogie et la procrastination. À 88 ans, rejoignant l'indignation des jeunes générations, il retrace sans concession la faillite des boomers, qui laissent à la charge de leurs enfants une société du vieillissement submergée par la dette et la dépendance.
Une irresponsabilité reposant sur le dévoiement de l'idée de liberté, passée de celle du « tous ensemble » au service du bien commun à celle du « moi d'abord » au service des égoïsmes individuels. Pour réconcilier les générations, il nous faut de toute urgence refonder une liberté collective.
Face aux immenses enjeux, des solutions existent qui ne ruineront pas le pays, n'accableront pas les plus jeunes, ne conduiront pas à l'abandon des plus âgés. Par des propositions comme le Conseil de prévision, ce livre en apporte, très concrètement, la preuve. Pour que le désastre en cours se transforme en chemin du renouveau.
« Vivant en France depuis 1994, française depuis 2002, j'ai constaté l'évolution du discours politique qui n'a cessé de dériver, jusqu'à la cristallisation actuelle autour de l'identité. Pour la binationale que je suis, construite par la langue et les valeurs humanistes, la tristesse va crescendo. Bien que consciente de mon impuissance, j'ai la faiblesse de ne pouvoir être indifférente aux voix qui s'élèvent, prônant la haine. » Fatou Diome.
Dans cet essai personnel et émouvant, Fatou Diome renvoie dos à dos les identitaires étriqués et les opportunistes victimaires, qui monopolisent le débat politique. Elle défend Marianne contre les faussaires des deux camps et dessine une France ouverte, laïque, lucide et généreuse, celle qui lui donne envie de se sentir française et sénégalaise.
La situation est inédite. Jamais, dans l'histoire de l'humanité, nous n'avons disposé d'autant d'informations et jamais nous n'avons eu autant de temps libre pour y puiser loisir et connaissance du monde. Nos prédécesseurs en avaient rêvé : la science et la technologie libéreraient l'humanité. Mais ce rêve risque désormais de tourner au cauchemar. Le déferlement d'informations a entraîné une concurrence généralisée de toutes les idées, une dérégulation du « marché cognitif » qui a une fâcheuse conséquence : capter, souvent pour le pire, le précieux trésor de notre attention. Nos esprits subissent l'envoûtement des écrans et s'abandonnent aux mille visages de la déraison.
Victime d'un pillage en règle, notre esprit est au coeur d'un enjeu dont dépend notre avenir. Ce contexte inquiétant dévoile certaines des aspirations profondes de l'humanité. L'heure de la confrontation avec notre propre nature aurait-elle sonné ? De la façon dont nous réagirons dépendront les possibilités d'échapper à ce qu'il faut bien appeler une menace civilisationnelle.
C'est le récit de cet enjeu historique que propose le nouveau livre événement de Gérald Bronner.
Au-delà du changement climatique, les dégradations de notre environnement que causent nos modes de vie ont des conséquences néfastes majeures sur la biodiversité et sur la santé humaine. Nous devons au plus vite transformer en profondeur nos interactions avec la Terre et les êtres vivants qui la peuplent. Car, en détruisant notre planète, c'est à nous-mêmes que nous faisons du mal. Jean Claude Ameisen nous rappelle que prendre soin de la nature et préserver sa splendeur, c'est prendre soin de l'humanité. À condition, aussi, de lutter pour la réduction des inégalités, pour la fin de la pauvreté, pour l'accès de tous aux droits fondamentaux, à la nourriture, à un toit, à l'éducation, à la prévention et aux soins.
Le texte original a fait l'objet d'une mise à jour pour la présente édition.
Ce livre est une enquête sur les pratiques et les voix des femmes dans le monde entier.
Il est d'abord informatif. Le tour du monde qu'il propose permet de savoir ce que font aujourd'hui les femmes pour lutter contre la domination masculine. Grâce à des entretiens avec des militant.e.s, à l'aide de tableaux récapitulatifs sur les grands problèmes qui se posent aux femmes aujourd'hui, par la restitution dans le texte même de tout un ensemble de voix plurielles, il peut être utilisé comme un vade-mecum des pratiques féministes contemporaines. Ces pratiques sont au coeur des luttes politiques les plus urgentes et les plus mobilisatrices : vivre avec et dans les milieux naturels (écoféminisme), construire des alternatives au capitalisme.
« Nous ne traversons pas un moment de crise anodin, nous vivons un moment décisif pour l'avenir de l'humanité. Comment s'extraire d'une dynamique qui nous échappe et d'un système qui nous conduit dans une impasse ? Nous avons chacun éprouvé combien les résistances au changement sont grandes. Pourtant, comme tant d'autres, nous refusons de nous résigner.
Un autre monde est à notre portée. Un monde fondé sur l'humilité, la sobriété et le partage. Un monde plus équitable, plus fraternel, davantage relié à la Terre. Ce monde n'est pas une utopie. Nous pouvons tous contribuer à le faire advenir. Mais cela ne sera possible que par une révolution des consciences. C'est à cette conversion de notre esprit et de nos modes de vie qu'aimerait contribuer modestement ce livre, fruit du partage de nos réflexions et de nos expériences.
N.H. et F.L.
Nicolas Hulot et Frédéric Lenoir, forts de leurs parcours riches et singuliers, apportent ici un éclairage personnel, pratique et spirituel sur les enjeux majeurs qui nous concernent tous.
La chute du mur de Berlin a plongé les gauches européennes en plein désarroi. Sur le champ de bataille des idées, le progrès, la liberté et l'universel ont fait place à une nouvelle triade directement importée des États-Unis : le genre, l'identité et la race. Les progressistes se battaient jadis au nom du prolétariat, du tiers-monde et des damnés de la terre. Trois discours - néoféministe, antiraciste et décolonial - désignent désormais l'homme blanc comme l'ennemi : son anatomie fait de lui un prédateur par nature, sa couleur de peau un raciste, sa puissance un exploiteur de tous les « dominés ». L'enjeu de cet essai est de montrer comment la lutte des races est en train de remplacer la lutte des classes, de balayer les problèmes sociaux et la méritocratie et de détruire l'idée d'humanité commune.Aussi percutant que dérangeant. Lire.Un livre événement. Le Figaro magazine.
La mécanique d'une chasse aux sorcières Encore inconnu il y a peu en France, le terme de «?woke?» a récemment envahi les réseaux sociaux et les journaux. Né des luttes antiracistes des Afro-Américains dans les années 1950, il revêt alors un sens positif?: celui d'être «?éveillé?», conscient politiquement. Mais il est aujourd'hui utilisé péjorativement pour attaquer toute forme d'engagement contre les discriminations. Pour ses détracteurs, la prétendue «?idéologie woke?» serait un nouvel avatar du «?politiquement correct?» ou de la «?cancel culture?» et infiltrerait les centres de pouvoir, des médias aux grandes entreprises, encourageant une déconstruction du monde par la bouche d'une génération radicalisée. Ainsi va la «?panique woke?». Et si cette panique cachait simplement une forme, classique mais violente, de réaction?? C'est cette offensive réactionnaire et sa mécanique idéologique qui sont ici décortiquées par Alex Mahoudeau, mieux connu sur les réseaux sociaux à travers le pseudonyme de «?Pandov Strochnis?».
Protestations, manifestations, émeutes, grèves, défiance... Depuis des années, la colère monte, les peuples ne cessent de rejeter l'autorité. Les raisons en sont connues : aggravations des inégalités, dégradations des conditions de travail, recul des services publics... Mais la violence avec laquelle elle se manifeste est inédite car exprimée par un sujet nouveau : l'individu tyran. Un être ultra-connecté, replié sur sa subjectivité et ses intérêts, capable en un clic de mettre le monde à ses pieds et dès lors persuadé d'en être l'unique centre. Et si les crises économiques renforcent l'impression d'être dépossédé, la technologie augmente celle d'être tout-puissant. Une combinaison explosive, qui signe l'effondrement de notre monde commun.
Artiste et penseuse féministe, Kate Millett (1934-2017) est une figure majeure de la seconde vague du féminisme aux États-Unis. Ses combats contre le patriarcat, le racisme, la guerre du Vietnam, la violence instituée, l'homophobie, l'enfermement sont liés aux mouvements américains de contestation des années 1960-1970, aux luttes de l'IRA en Irlande, des femmes lors de la révolution iranienne ou de l'antipsychiatrie.
Parler d'elle, c'est aussi rappeler tout un pan de l'histoire féministe et sociale.
Ce recueil accessible à toutes et tous, propose une sélection de lettres où Rosa Luxemburg aborde des sujets très variés, toujours attentive au monde qui l'entoure, aux souffrances, aux événements qu'elle observe, et surtout gardant toujours l'espoir d'une révolution qui amènerait un monde meilleur. Elle voulait « vivre pleinement », et elle souhaitait changer la société afin que chacun·e puisse y vivre harmonieusement.
Sans polémique, l'auteur analyse l'un des paradoxes de notre époque : le passé est dévalorisé - sa connaissance ne servirait à rien dans une société moderne -, et pourtant très investi - témoin le contrôle exercé par les régimes totalitaires sur la mémoire publique. Avec l'émergence de la cancel culture de virulents débats viennent désormais de la société elle-même. C'est précisément ce mouvement que l'auteur tente de décoder, en s'intéressant à trois problèmes majeurs : la mémoire historique (statues déboulonnées, noms supprimés) ; l'arrivée des trigger warnings dans l'espace artistique et la place de l'Antiquité classique à l'université.
Depuis quelques années, et dans le monde entier, nous voyons régulièrement les figures, les disciplines et les oeuvres les plus prestigieuses de la culture occidentale contestées et critiquées par une minorité de jeunes militants qui exigent leur exclusion de la culture commune. En un mot, leur effacement : cancel. Celle-ci ne serait, au fond, rien d'autre qu'un système de légitimation d'un ordre patriarcal, raciste et colonial.
Face à ces accusations, beaucoup sont perplexes. Pourtant, il s'agit de l'un des débats les plus importants de notre temps. Que répondre à ceux qui accusent Churchill d'avoir eu une vision du monde « raciste » ? À ceux qui font valoir que Carmen s'achève sur un « féminicide » ? Tout cela est vrai. Mais faut-il pour autant déboulonner les statues du Premier ministre britannique ou récrire la fin de l'opéra de Bizet ?
Telle est la question que Pierre Vesperini saisit à bras le corps, en mettant ses outils d'historien philosophe au service du débat d'idées.
Serge Latouche invite à parier sur une société de décroissance pour échapper à la régression économique et formule un véritable plaidoyer en faveur d'un changement radical de paradigme économique.
Caricaturée par ses adversaires en une régression économique et sociale radicale, la décroissance se veut au contraire une perspective d'avenir pour y échapper : celle d'un refus du gaspillage des ressources naturelles, d'une prise en compte de leurs limites qui rendent d'ores et déjà impossible la généralisation à toute la planète du mode de vie occidental. Aussi exige-t-elle un changement radical de paradigme, ce que l'auteur appelle une société de décroissance.
Une telle société donnerait un autre sens à la production et à la consommation, réorientant les arbitrages politiques, relocalisant l'économie, limitant les échanges dispendieux mais stimulant la convivialité.
Cet appel à la décroissance, qui rencontre de nombreux échos depuis que la crise planétaire a éclaté et que les menaces écologiques et sanitaires se précisent, est aussi un appel à l'imagination.
Même si les partis populistes d'extrême droite ont connu un développement différent dans les pays étudiés dans cet ouvrage (Autriche, Allemagne, Angleterre, Espagne, France, Italie, Suisse), ils ont en commun de nombreux caractères. Parmi ceux-ci, l'un des plus inquiétants touche à l'évolution de leur ligne idéologique. La notion de grand remplacement prolongeant celle du rejet de l'immigration en est un indice, mais plus généralement, après s'être dégagés des groupuscules nostalgiques du nazisme, du franquisme ou du fascisme et avoir tenté de présenter une façade respectable, force est de constater que les partis populistes de ces pays évoluent vers une vision identitaire. Un livre admirablement construit et documenté.
Rarement une nouvelle technologie aura soulevé autant de passions, avant même son implantation, que le développement de la téléphonie mobile de cinquième génération, dite 5G. Suscitant les pires craintes sur les plans sanitaire et écologique ou en matière de sécurité et de surveillance pour les uns, elle constitue pour les autres une véritable révolution ouvrant tout un monde de possibilités. Comment faire la part des choses? C'est là l'exercice auquel s'est prêté le collectif Atécopol, pour qui la 5G est d'abord et avant tout un cas d'école de la course en avant technologique et de l'obsolescence programmée. En montrant les limites d'une approche strictement technocratique pour évaluer cette technologie imposée, le collectif nous rappelle que le débat entourant la 5G soulève l'enjeu de la nécessaire appropriation démocratique des choix technologiques. La question de la technique est d'abord une question politique.
Quel monde allons-nous laisser à nos enfants ? L'enjeu intergénérationel de l'écologie est immense. C'est en écrivain, en amoureux des récits et des lois qui unissent les hommes et les femmes au vivant qu'Éric de Kermel dessine les pistes pour répondre à cette question.
Nous nous étions habitués à faire reposer l'ordre du monde sur la promesse faite à nos enfants d'un monde meilleur. Aujourd'hui que nous savons cette promesse impossible, quel sens peut-il y avoir à faire des promesses qui ne peuvent être que fragiles ? Et si c'était cette fragilité qui permettait de transmettre le désir d'entrer en lien avec tout le vivant ? Et s'il fallait compter avec cette fragilité-là pour redonner sens à l'écologie ? Les pistes que dévoile le romancier résonnent avec les photos de Yann Arthus-Bertrand, où la terre vue du ciel est à la fois porteuse de blessures arides et de promesses fécondes. Un dialogue riche et puissant pour nourrir nos imaginaires d'horizons plus vastes et de possibles renouvelés.
C'est à la disparition du monde des "choses" ou des "objets" que Byung-Chul Han consacre ce nouveau livre. Les choses stabilisent la vie humaine, lui confèrent une continuité. Pôles de repos du monde, les choses sont aujourd'hui totalement recouvertes par les informations. Mais il n'est pas possible de séjourner auprès des informations... Quel rapport entretenons-nous désormais avec les choses ? Que deviennent-elles lorsque, pénétrées par les informations, elles deviennent elles-mêmes des informations et s'immatérialisent ? Han poursuit sa critique de la rationalité technique et numérique en s'interrogeant sur la signification des objets et leur effet dans notre existence. Sans doute le plus nostalgique, le plus touchant et le plus polémique des livres de Han parus en langue française.
La France, tôt confrontée à l'immigration, et marquée aussi par son passé colonial, a vu monter la prégnance de la figure de l'Autre dans la vie de tous les jours, comme au coeur du discours politique.
Qu'il soit issu du regroupement familial, étudiant, travailleur qualifié ou non qualifié, travailleur temporaire, frontalier, réfugié, demandeur d'asile, sans papiers, le migrant incarne souvent une figure menaçante, toujours sujette aux mêmes stéréotypes. Au fil des diverses vagues d'immigration, les critères de l'altérité demeurent intacts?: la religion (des Polonais «?bien trop catholiques?» dans la France laïque de la Troisième République aux musulmans «?islamistes?» ), la violence (du «?couteau facile?» des Italiens dans les années 1890 au terrorisme importé de Syrie), la concurrence déloyale sur le marché du travail (du «?un million de chômeurs, c'est un million d'immigrés de trop?!?» des années 1970 au plombier polonais).
En se basant sur les articles de journaux, les proclamations politiques, les ouvrages de sciences sociales, mais aussi les romans et films, Catherine Wihtol de Wenden montre comment la mémoire collective concernant l'image de l'Autre s'est construite de 1870 à nos jours. Et propose quelques pistes pour en finir avec la figure péjorative du migrant?: une citoyenneté inclusive, la lutte contre les discriminations, la construction d'une mémoire du vivre ensemble par la mise en musées.
« Ce livre d'Angela Davis est, pour moi, une révélation et une véritable rééducation. » (Toni Morrison) Blues et féminisme noir explore l'oeuvre de deux blueswomen quelque peu oubliées : Gertrude « Ma » Rainey (1886-1939) et Bessie Smith (1894-1937). La première incarne le blues traditionnel, la seconde, le blues classique. Dévalorisée par les spécialistes du blues et du jazz - qui sont en général des hommes blancs -, l'oeuvre de ces chanteuses porte un message spécifique : elle affirme la place et les revendications d'autonomie des femmes noires américaines.
En analysant et en contextualisant les paroles de leurs chansons, Davis met en évidence les prémices du féminisme noir et les signes avant-coureurs des grandes luttes émancipatrices à venir. Elle montre que Ma Rainey et Bessie Smith furent les premières rock stars de l'histoire de la musique : or elles étaient noires, bisexuelles, fêtardes, indépendantes et bagarreuses.
Elles posèrent les bases d'une culture musicale qui prône une sexualité féminine libre et assumée, qui appelle à l'indépendance et à l'autonomie des femmes aux lendemains de la période esclavagiste, en revendiquant avec détermination l'égalité de « race » et de genre.
Cette réflexion s'étire aux années 1940 en évoquant l'oeuvre de Billie Holiday (1915-1959). Angela Davis réhabilite la conscience sociale de cette chanteuse d'envergure, trop souvent présentée sous le simple prisme des turpitudes de sa biographie.
Blues et féminisme noir propose une histoire féministe et politique de la musique noire des années 1920 aux années 1940.
Née dans une famille juive en Lituanie en 1869 et morte à Toronto au Canada en 1940, Emma Goldman a surtout vécu et milité aux États-Unis. «La femme la plus dangereuse d'Amérique», selon l'ancien directeur du FBI J. Edgar Hoover, elle est une figure majeure de l'anarchisme et de la lutte du début du XXe siècle pour l'émancipation des femmes. Toute sa vie, elle fut une redoutable agitatrice et propagandiste anticapitaliste, anticléricale et antimilitariste.
Regroupant le plus grand nombre de textes d'Emma Goldman traduits en français, cette anthologie compose un vibrant plaidoyer en faveur du syndicalisme révolutionnaire, de l'athéisme et de l'égalité entre les sexes, ainsi qu'une charge implacable contre le patriotisme et le puritanisme. Emma Goldman y prend entre autres la défense de la pédagogie anti-autoritaire de Francisco Ferrer, elle critique sévèrement le pouvoir bolchevique en Russie et s'en prend au système carcéral, preuve d'un échec social collectif.
Ces textes ont une valeur historique et font écho à des préoccupations et des luttes d'aujourd'hui. Ils sont présentés par Francis Dupuis-Déri et traduits par Thomas Déri, à qui l'on doit L'anarchie expliquée à mon père (Lux, 2016).
Un essai brûlant d'actualité et percutant qui plaide pour la réinvention d'une identité « afropéenne » afin de sortir de l'impasse de la question raciale.
« Afropea est un agent de liaison au sens positif du mot. C'est ce qu'elle peut représenter de plus noble. N'en faire qu'une expression supplémentaire de la douleur afrodescendante la dévaluerait. Ne la percevoir que comme une identité noire vécue sur le sol européen apporterait de l'eau au moulin des nationalistes culturels. Il n'y aura pas de retour vers une Afrique qui, non seulement n'attend personne, mais pour laquelle la couleur de la peau est un marqueur d'appartenance insuffisant. C'est à partir de soi et de son lieu que chacun est invité à oeuvrer pour transformer le monde. ».
Ceux qui se sont donné le beau nom d'Afropéens, par lequel l'Afrique et l'Europe fusionnent, s'ils sont fidèles à cette association, peuvent incarner un projet de société fraternel, anti-impérialiste et antiraciste. C'est cette utopie qu'explore Léonora Miano dans cet essai vif et dense, qui prend une couleur personnelle lorsqu'on comprend qu'elle l'a aussi écrit pour sa fille.